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Twitter et la télévision : cosmétique ou Eldorado ?

Twitter et la télévision : cosmétique ou Eldorado ?

Pas une émission de télévision sans des @ ou des # affichés à l’antenne (Lire La série TV à l’ère de la télévision connectée), Twitter et les chaines de TV semblent de plus en plus étroitement liés. Alors que Twitter s’apprête à rentrer en Bourse, la social TV est plus que jamais un des axes majeurs de monétisation de la plateforme de micro blogging.
Précisions sur ces tendances et prospective, avec Thibault Celier, Directeur média chez Novedia Group.

Pas une émission de télévision sans des @ ou des # affichés à l’antenne (Lire La série TV à l’ère de la télévision connectée), Twitter et les chaines de TV semblent de plus en plus étroitement liés. Alors que Twitter s’apprête à rentrer en Bourse, la social TV est plus que jamais un des axes majeurs de monétisation de la plateforme de micro blogging.

Précisions sur ces tendances et prospective, avec Thibault Celier, Directeur média chez Novedia Group.

La pratique conjointe de la TV et de Twitter est-elle mainstream ?

1111 Citations de Stratégie, Marketing, Communication, par Serge-Henri Saint-Michel

Ce qui est mainstream c’est surtout ce qu’on appelle le « multitasking ». Plus de 70% des téléspectateurs regardent la télévision avec du web sur les genoux au travers d’un smartphone, un ordinateur ou une tablette.

Cette pratique traverse les générations. C’est une tendance lourde, une sorte d’addiction généralisée à la connexion.

Sur ces petits écrans, les multitaskeurs font un tas de choses comme checker leurs emails, préparer leurs vacances, envoyer des SMS … et une partie est sur Twitter.

Twitter représente la partie émergée de l’iceberg « multitasking ». Il ne s’agit pas d’un usage massif mais, à la différence de Facebook, cette grande conversation TV en temps réel est publique, et se voit de plus en plus.

Selon une étude publiée par Mesagraph et Médiamétrie, plus de 800 000 personnes ont commenté au moins un programme TV sur Twitter, soit 2,3 fois plus qu’en septembre 2012.

Nous observons une spécialisation de ce type de pratiques qui se cristallisent autour des gros événements de télévision très fédérateurs, les prime times. On est donc loin d’une structure de longue traine.

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Les réactions se déchainent essentiellement autour du sport, du divertissement ou de l’information. Les points communs entre ces programmes qui font réagir spontanément sur Twitter : le rapport à l’inattendu, des personnages clés qui suscitent la polémique, une narration lâche avec des temps mort pour s’emparer de son smartphone.

Ainsi, selon Mesagraph, les NRJ Music Award 2013, record de l’année 2013, ont suscité plus de 1,3 million de tweets. Un autre exemple récent : la barre des 480 000 tweets a été dépassée il y a quelques semaines lors du match OM/PSG, ce qui en fait l’événement sportif le plus commenté de l’année… en attendant les prochains matchs de l’équipe de France de foot. Nous mettons d’ailleurs en scène en temps réel cette activité sur le site www.socialtv-livebattle.com.

Quels sont les segments les plus utilisateurs de Twitter et de la TV ?

Selon l’étude publiée par Médiamétrie et Mesagraph, le phénomène serait particulièrement important chez les jeunes adultes : un jeune de 15-24 ans sur trois a ainsi déjà posté un commentaire sur un programme de télévision sur un blog, un réseau social ou le site Internet de la chaîne de télévision concernée. Toujours selon la même étude, cette pratique serait plutôt masculine.

Sur Twitter, il reste assez difficile de qualifier très précisément cette audience à travers les critères habituels. A la différence de Facebook, un utilisateur de Twitter avance couvert. Le Twitto est en effet beaucoup plus anonyme. Les données personnelles demandées lors de l’inscription au service sont souvent incomplètes, c’est davantage l’analyse de l’historique de ses réactions qui permet d’en savoir plus et cela est tout aussi riche.

… Et pour quels usages concrets ?

Au départ, et on l’oublie souvent, les gens ont tweeté à propos de la télévision sans qu’on le leur demande, sans qu’aucun hashtag ne soit affiché à l’antenne. Ni Twitter, ni les chaines ne sont à l’origine de ces usages, les gens l’ont fait car ils en avaient simplement envie. Il s’agit d’une réelle innovation par l’usage.

C’est la rencontre d’un vieux média, la télévision, et sa capacité unique à créer du lien social, avec une plateforme extrêmement simple, neutre, et ouverte, Twitter, naturellement adaptée à ces réactions spontanées.

Pendant les programmes de télévision, Twitter devient un reflet numérique de nos conversations orales. C’est un flux incessant de réactions qui mêle le pire et le meilleur : le vide intersidéral y côtoie des saillies savoureuses, comme dans la vie. C’est souvent irrévérencieux et critique, voire violent mais c’est surtout extrêmement vivant.

Pour le téléspectateur, qu’il y participe ou qu’il soit juste spectateur, c’est l’impression de vivre un événement ensemble, pas forcément son cercle d’amis proche, de faire partie d’un tout, avec tout ce qu’il y a de grisant là-dedans.

On distingue trois grands types de réactions sur Twitter autour d’un programme de télévision :

  • une implication personnelle dans le programme, au premier degré, du type j’aime/j’aime pas.
  • des réactions qui apportent des précisions supplémentaires sur le programme comme par exemple : un lien, une anecdote, une photo oubliée, du fact checking.
  • du second degré, de l’humour, ce n’est pas forcément un avis personnel. L’objectif est plus de provoquer une réaction chez l’autre, de se faire retweeter.

Selon le type programme, ces catégories sont plus ou moins représentées. Ainsi, le sport sera plus propice à des réactions plutôt 1er degré (du type « but!!! » ou « à mort l’arbitre! ») quand une émission politique entrainera davantage des réactions plus « informatives ».

Quels atouts pour les chaines comportent ces profils d’audience utilisant Twitter et la télévision ?

Si la durée d’écoute moyenne quotidienne de la TV augmente, l’âge moyen des téléspectateurs augmente lui aussi. La télévision vieillit tranquillement, année après année, avec ses téléspectateurs. Ces nouvelles pratiques sont d’abord une opportunité pour les grands médias de se rapprocher de leur public plus jeune, dont l’attention est de plus en plus captée par le jeu des réseaux sociaux et du web.

Thibault Celier, Directeur média chez Novedia Group

Thibault Celier, Directeur média chez Novedia Group

Cet engagement sur les réseaux sociaux joue un rôle de caisse d’amplification médiatique pour le programme aussi bien avant, pendant qu’après sa diffusion. La durée de vie d’un programme s’allonge au delà de la diffusion. D’autre part, c’est la possibilité de rester en contact avec un public et de bâtir des dispositifs entre les diffusions pour les fidéliser.

Les contributions de ces nouveaux téléspectateurs sont autant d’indications sur la réception d’un programme par un public, une sorte de « focus group » en temps réel en somme. Pour un certain type de programme, l’intensité des réactions sur Twitter tend à devenir un indicateur clé en complément des audiences TV traditionnelles. Ainsi, si une émission de divertissement en prime time génère peu ou pas de tweets, le directeur des programmes peut se poser des questions.

Au-delà des données qualitatives ou quantitatives pour une direction des programmes, c’est l’opportunité pour les producteurs de construire un nouveau type de programmes en sollicitant directement le public au travers des réseaux sociaux. Une nouvelle relation plus horizontale s’installe, où le public devient presque coproducteur du programme.

Et en terme de revenus, de business model ?

Si jusqu’à maintenant la priorité a été avant tout de développer les usages, les business models sont en construction notamment sous l’action de Twitter, qui en a bien besoin à l’aube de son entrée en bourse.

Premier axe de monétisation souvent évoqué, l’influence de ces nouveaux usages sur l’audience TV, le cœur de la télévision gratuite ! L’activité sociale sur Twitter autour d’un programme encouragerait certains utilisateurs à allumer leurs télévisions. Ce lien entre audience sociale et audience TV reste encore très difficile à prouver aujourd’hui et est sûrement plus complexe qu’un simple lien de causalité.

Un exemple récent milite en ce sens : Secret Story 7 en juin dernier a réalisé le pire démarrage de son histoire, avec 3,3 millions de téléspectateurs, mais un record en termes de tweets avec près de 800k tweets. En revanche, cette activité sociale peut potentiellement jouer un rôle de recommandation sur un certain public, connecté et avide des réseaux sociaux.

A l’antenne, les diffuseurs communiquent de plus en plus sur les hashtags officiels afin d’amplifier cette conversation sur Twitter. Sur certaines émissions, ce mode d’interaction gratuit, le hashtag, coexiste voire rentre en concurrence avec des dispositifs traditionnels payants pour l’utilisateur, comme le SMS et les appels surtaxés. Difficile pour les diffuseurs de succomber aux sirènes de la modernité, et de renoncer à ce filon encore très rémunérateur. Ce n’est pas sans compter sur Twitter qui multiplie les initiatives afin de monétiser tous ces tweets qui parlent de TV.

Pour Twitter, il devient urgent de monétiser cette audience de plus en plus significative sur sa plateforme main dans la main avec les diffuseurs. Twitter leur propose ainsi une palette d’outils pour cibler au mieux ces téléspectateurs d’un nouveau genre et séduire les annonceurs. Après les tweets, comptes ou trending topics sponsorisés, Twitter vient de lancer Amplify, une solution qui permet de diffuser vers une audience ciblée des vidéos courtes qui intègrent de la publicité. La solution Amplify a d’ailleurs été utilisée récemment par TF1 pendant l’émission Danse avec les Stars.

Les tweets ne donnent-ils pas la fausse impression d’écouter les téléspectateurs ?

Depuis ses débuts, la télévision a toujours cherché à résoudre un vieux problème : elle ne voit pas son public. Il est loin et n’est pas incarné à l’antenne. Pour le faire exister, les chaînes ont utilisé différents subterfuges : SMS, standard téléphonique, courrier des lecteurs et maintenant tweets, mais aussi des idées de mise en scène, comme le public très discipliné d’un plateau ou les rires enregistrés des séries. Twitter, avec son flux de messages liés aux programmes, constitue une réelle opportunité de donner corps aux spectateurs pour résoudre ce problème de fond. Les tweets à l’antenne sont une première étape, une actualisation de vieux modes d’interactions comme le SMS ou le courrier des lecteurs. Cela reste très vertical et forcément un peu frustrant pour une partie des utilisateurs actifs qui ne se voient pas à l’antenne.

Le média social donne la possibilité de mesurer le pouls de l’audience en temps réel et de la représenter à l’antenne. Plus que dans le contenu des tweets, l’avenir est dans les chiffres qui parlent au travers de dataviz, des représentations graphiques « vivantes » qui visualisent en temps réel les soubresauts et accélérations des réactions du public connecté.

Au-delà de Twitter, c’est surtout la consommation conjointe du web et de la télévision qui est une immense révolution pour le secteur. L’enjeu est de transformer un symptôme, le multitasking, en une opportunité pour créer de nouvelles expériences de contenus et par extension de nouvelles expériences publicitaires. Il s’agit de raconter des histoires en intégrant finement la télévision et les autres écrans. C’est l’opportunité de replacer la publicité au centre des usages qui permettra de marier (enfin) la puissance du média TV avec les capacités de ciblage et de personnalisation du web.

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Compte Twitter de Novedia @kindofTV

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Un article de notre dossier Twitter & Marketing

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(c) ill. Shutterstock – attractive young woman standing and juggling with social network icons

1 Commentaire

1 Commentaire

  1. Aude

    28 novembre 2013 à 18:33

    je ne suis pas sûre que la télévision reste un outil indispensable dans un futur proche. et les innovations du moments sur le poste de télé lui-même n’ont rien de fantastique ni d’original. même la 3D ne va pas faire réellement la différence. il faudra trouver autre chose pour résister à la concurrence d’internet. super article, merci

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