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L émergence de la Marque Digital-Only

La croissance des DNVB, marques nées avec le digital, challenge les marques "traditionnelles". Ces nouvelles venues les feront-elles disparaitre ?

La croissance des DNVB, marques nées avec le digital, challenge les marques « traditionnelles ». Ces nouvelles venues les feront-elles disparaitre ?

La croissance insolente des DNVB, ces marques nées avec le digital, challenge distributeurs et marques « traditionnels ». Ces nouvelles venues sont-elles là pour les faire disparaitre ou est-ce juste un feu de paille ? Pour répondre à ces questions nous avons analysé les 100 premières DNVB aux USA et en France pour comprendre les clefs de leur succès.

« DNVB » est l’acronyme de Direct Native Vertical Brands. Ces marques, issues du digital, maîtrisent tant leur production que leur distribution. Elles ont également su développer une relation affinitaire avec leurs clients. Il s’agit de Bonobo, Blue Apron, Warby Parker aux USA, du Slip Français ou Envie de Fraise en France.

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Les DNVB sont également appelées « V-Commerce », pour souligner leur intégration verticale ou « Direct-to-Consumer Brands » pour mettre en avant l’importance de leur relation directe avec leurs clients.

Ces marques, avec une croissance 3 fois supérieure à celle du e-commerce, sont l’une des avancées les plus intéressantes de la distribution online de ces dernières années.

Elles sont sur une tendance à plus de 12 Mds € de CA pour 2018 et si certains distributeurs ou marques traditionnels les considèrent comme une nouvelle mode éphémère, la clientèle, elle, répond présent.

Tandis qu’un nombre croissant de consommateurs dépensent une part de plus en plus importante de leur budget sur le Web, les DNVB prennent une part significative de ces ventes. Dans un futur proche, elles ont le potentiel de faire disparaître des marques et des distributeurs plus traditionnels. Ceux qui veulent survivre devront travailler encore plus dur pour maintenir leurs parts de marché, notamment en s’inspirant des nouvelles perspectives ouvertes par les DNVB.

Notre analyse des 100 premiers acteurs en France et aux USA fait ressortir 7 facteurs de différenciation.

# 1 : Une activité Amazon Proof

Amazon domine le e-commerce et, demain, la distribution dans son ensemble. Mais il reste un espace pour des distributeurs de niche qui peuvent atteindre une clientèle d’une manière plus expérientielle, plus personnelle. Car plus les consommateurs sont impliqués plus il est aisé de les rendre fidèles. Tandis que certains se basent sur une croissance de leur activité en vendant via des places de marché telles qu’Amazon ou ebay, construire une communauté de consommateurs passionnés par un type de produit peut aider à attirer d’autres acheteurs semblables. Plus des 2/3 des DNVB ne sont pas disponibles sur Amazon.

Adoptez un livre

La question clef est alors de savoir s’il est possible, pour une marque, d’acquérir de façon rentable un client online. Les marques vont via des tiers, telles les marketplaces, parce qu’elles ont un trafic massif. Mais quand on a, comme la DNVB Kuiu (75 M$), dédiée au matériel haut de gamme pour la chasse sportive, une base client impliquée, passionnée, qui connait vos produits, vous n’avez pas besoin de cela. Jason Hairston, le fondateur de Kuiu, communique avec ses fans via un blog, lit leurs commentaires et prend des décisions de lancement ou d’amélioration produit basées sur les retours clients.

Plus les clients sont impliqués, plus il est aisé pour les marques de les transformer en clients fidèles. Tandis que de nombreuses startups dépendent pour leur croissance de grandes marketplaces, créer une communauté de clients passionnés pour un type de produits permet d’attirer d’autres acheteurs aux centres d’intérêts similaires.

Si les marques « direct-to-customer » évitent d’être sur les places de marché c’est non seulement pour construire une relation forte avec leur clientèle, c’est également pour leur permettre d’exprimer pleinement leurs avantages produits. C’est par exemple le cas de la marque de vêtements de voyage, Scottevest (15 M$), qui fait un usage massif de vidéos, d’images augmentées ou de chat en ligne. Non seulement pour exprimer ses USP mais également pour limiter fortement ses taux de retour.

# 2 : Des offres personnalisés

Jean-Paul Crenn, fondateur de VUCA Strategy

Jean-Paul Crenn, fondateur de VUCA Strategy

Outre le fait de vendre des produits hautement spécialisés, les marques peuvent se défendre contre Amazon en offrant des produits qui sont réellement uniques pour chaque acheteur (même si Amazon a déjà déposé des brevets en ce sens dans l’habillement). Si Amazon propose actuellement des fonctionnalités de personnalisation, celles-ci sont limitées et se limitent dans la plupart des cas à des listes de sélection ou des options d’inscription. Amazon excelle dans la masse, bien moins dans la gestion de l’exception. La DNVB Proper Cloth (75M$), spécialisée dans les chemises personnalisées, obtient de ses clients des masses de données pour, justement, pouvoir mener à bien les personnalisations des vêtements (tour de col, emmanchures…) mais aussi pour améliorer la coupe de l’ensemble de ses gammes.

# 3 : Une Personnification de la marque

Si une marque comme Amazon est fatalement impersonnelle, de nombreuses marques se sont construites autour d’une star. Si, il y a 10 ans, une célébrité avait souhaité se lancer dans les affaires, elle aurait monté un partenariat avec un designer ou une grande marque. De nos jours, des stars comme Jessica Alba ou Reese Witherspoon créent leurs marques digitales et leurs boutiques. Respectivement The Honest Company (500 M$) ou Draper James (10 M$). Cependant toutes les marques n’ont pas besoin d’une star. La mise en avant d’un fondateur charismatique, tel Michael Dubin pour Dollar Shave Club (500 M$) et sa vidéo virale ou Guillaume Gibault pour Le Slip Français peuvent « suffire » pour donner ce « supplément d’âme ».

# 4 : Une intégration verticale

Les marques « Direct-to-customer » existaient bien avant Internet mais une barrière à l’entrée relativement faible pour les ventes en ligne couplée avec un contrôle de l’ensemble de la supply chain, de la fabrication à la distribution, procure un avantage concurrentiel aux marques centrées sur le web. Et l’un des avantages « historique » du modèle de la vente directe persiste : une marque vendant directement n’a pas à remiser ses produits pour le revendeur qui ensuite applique sa marge pour la vente au consommateur final. Everlane, une DNVB dans le secteur de l’habillement (135M$) va même jusqu’à présenter sur son site la structure de ses coûts.

# 5 : Des revenus récurrents

35% des revenus des DNVB que nous avons étudiées proviennent d’abonnements. Que ce soit pour de l’alimentaire, des lentilles correctrices ou des rasoirs l’abonnement est au cœur du modèle économique – et de la rentabilité des marques nées avec le digital.

# 6 : Le online comme rampe de décollage

Si les DNVB ont débuté online elles ne se limitent pas à ce mode de commercialisation. Bonobos (250 M$) a 48 « points de rencontre », Warby Parker (500 M$) a 65 magasins physiques, représentant plus de 50% de leur CA. Certaines vont même jusqu’à monter des partenariats avec des distributeurs.

# 7 : Des racines techniques

Les DNVB ressemblent bien souvent plus à des startups de la Tech qu’à des distributeurs. Et c’est bien, d’une certaine manière, ce qu’elles sont. Plusieurs de ces entreprises ont créé leur propre logiciel pour tracker les interactions clients, pour obtenir des feedbacks ou pour gérer leurs stocks. Tel Proper Cloth, qui utilise un algorithme auto-apprenant pour prédire les mesures exactes de ses clients ou Nectar, dans le secteur des matelas, qui segmente ses prospects fonction de leur comportement de navigation.

Ainsi, avec ces 7 facteurs de différenciation les DNVB captent une part toujours plus importante des ventes réalisées online, sur la frange la plus dynamique de consommateurs.

Avec elles le monde de la distribution se constitue en niches de marché face aux mastodontes tels Alibaba ou Amazon.

Les DNVB ont le potentiel, dans un futur proche, de faire disparaître des marques et des distributeurs plus traditionnels.

Ceux qui veulent survivre devront travailler encore plus dur pour maintenir leurs parts de marché, en s’inspirant notamment des 7 facteurs de différenciation des DNVB.

Auteur : Jean-Paul Crenn, fondateur de VUCA Strategy, Président ADETEM Toulouse Occitanie

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(c) Ill. DepositPhotos

1 Commentaire

1 Commentaire

  1. Loric

    31 août 2018 à 15:59

    Bonjour Jean-Paul,

    Article très intéressant dont je partage les principales idées. Je retiens notamment les points suivants pour « exister » aujourd’hui sur internet :

    – la spécialisation (marché de niche) car les marchés de masse sont détenus par les « gros » acteurs aux moyens considérables. La spécialisation permet de focaliser ses budgets, de cibler davantage son client idéal, tout en permettant de proposer une offre plus pointue (et donc de se démarquer des généralistes).

    – la personnification de la marque : en dehors de s’adosser à une star (pas donnée à toutes les entreprises) ou d’être un entrepreneur charismatique (pas donnée également à tout le monde !), je retiens la nécessité de créer une âme et une proximité avec ses clients. C’est notamment ce qui permet au « petit » commerce de survivre face aux « gros » qui sont « déshumanisés » à cause de leur taille.

    à bientôt.

    Loric

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