La veille n’est ni oracle, ni divination, ni présage. Elle participe à la détection des menaces et opportunités. de fait, elle est partie prenante à la stratégie, définie par Peter Drucker, dans L’avenir du management, comme « ce qui permet à l’organisation de se montrer opportuniste dans le cadre d’un projet » (49). La veille répond aussi aux injonctions de Sun Tzu, dans son traité l’Art de la guerre, de Sun Tzu : « Débarrassez les plans du doute et de l’incertitude » (XI 44) et « Percez donc à jour les plans de l’ennemi et vous saurez quelle stratégie sera efficace et laquelle ne sera pas » (VI 20).
La veille suppose et permet une « estimation de la situation » (I) et la compréhension de l’environnement de l’entreprise : les forces internes et externes (III 31 sq.) X 23 et X 24), le SWOT (Notes sur Wu Ch’i, III, 2).
Sun Tzu et la veille des facteurs d’environnement
La veille doit ainsi globalement permettre d’acquérir des renseignements sur
- L’état du marché, de la demande et de la concurrence (I 5, I 6, III 27 et V 25), « déterminez les dispositions de l’ennemi et ainsi assurez-vous du lieu du combat » (VI 22)
- Les relations entre le management et les équipes (I 4, I 7), la gestion des RH et de l’organisation (I 8 et III 27).
La veille aide l’entreprise à décider d’options stratégiques : attaque de la stratégie (III 4) et du moral de l’ennemi, mouvements sur les marchés, ruptures d’alliances, etc. et de vaincre (V) rapidement l’ennemi, parfois même sans combattre (III 10).
La veille s’appuie de plus sur des objectifs clairs : « celui qui n’a pas clairement conscience de ses objectifs ne sait pas riposter à l’ennemi » (III 23) afin de profiter des opportunités repérées : « constituez une armée invincible et attendez le moment où l’ennemi sera vulnérable » (III, 28), puisque « notre invincibilité dépend de nous, la vulnérabilité de l’ennemi, de lui » (IV 2).
La veille marketing et stratégique se projette au-delà des apparences
« Tout l’art de la guerre est basé sur la duperie » (I, 17). Cela rend difficile le travail du veilleur qui est confronté à l’intoxication, au camouflage de l’information : « Le fin du fin, lorsqu’on dispose ses troupes, c’est de ne pas présenter une forme susceptible d’être définie clairement. Dans ce cas, vous échapperez aux indiscrétions des espions les plus perspicaces et les esprits les plus sagaces ne pourront établir de plan contre vous » (VI 24). L’entreprise doit donc ne pas avoir de forme figée afin de diffuser des signaux erronés sur sa forme, lui permettant de surprendre l’adversaire au moment de l’attaque : « bien que chacun ait des yeux pour saisir les apparences, nul ne comprend comment j’ai créé la victoire » (VI25).
Il convient donc de veiller avec circonspection et calme, sagesse presque : « Ne vous jetez pas goulûment sur les appâts qui vous sont offerts » (VII 29), cela peut être de l’intoxication, de faux renseignements, des faits erronés émanant de traitres et d’agents secrets (VIII 14 ; le chapitre XIII qui en aborde les différents profils). »Une armée sans agents secrets est exactement comme un homme sans yeux ni oreilles » (XIII 23).
Qualité de la veille : anticipation et clairvoyance
« Lorsque le coup de tonnerre éclate, il est trop tard pour se boucher les oreilles » (I 26). Et Sun Tzu d’ajouter : « Prévoir une victoire que le premier venu peut prévoir n’est pas le comble de l’habileté » (IV 8) et « distinguer le soleil de la lune n’est pas preuve de clairvoyance ; entendre un coup de tonnerre ne prouve pas qu’on a l’ouïe fin » (IV 9).
Ainsi, en veille comme en stratégie, finesse d’analyse, discernement et décodage des signaux faibles évitent les mauvaises surprises.
Sun Tzu invite le veilleur à décoder des signaux : « lorsque les porteurs d’eau boivent avant de livrer l’eau au camp, les troupes souffrent de la soif » (IX 33), « lorsque l’ennemi voir un avantage mais n’avance pas, c’est qu’il est las » (IX 34), « lorsque ses drapeaux et ses étendards [= les marques, par exemple] se déplacent constamment de-ci de-là, il est désorganisé » (IX 38), etc.
Une veille rapide oriente une stratégie réactive
Une veille efficace et rapide (Sun Tzu aborde aussi l’importance de la rapidité de livraison de l’information), accompagnée d’une pertinente analyse, donne naissance à des stratégies victorieuses. « Ainsi, une armée victorieuse l’est avant de chercher le combat » (IV 14). Cette analyse consiste en l’appréciation de l’espace, l’estimation des quantités, les calculs, les comparaisons (un benchmark en somme !) et la déduction des chances de victoire (IV 16 sq.).
Dernière étape, les opportunité relevées par la veille doivent être rapidement exploitées (V 131) ; « pesez la situation et agissez » (VII 15), par exemple via des attaques surprise (XI 26) tirant parti du manque de préparation de l’ennemi (XI 29).
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- Acheter L’art de la guerre
, de Sun Tzu. Les références entre parenthèses portent sur les chapitres (chiffres romains) et les paragraphes (chiffres arabes).
- Lire La boite à outils de l’intelligence économique pour des détails sur les notions, méthodes et outils de veille
- Critique de L’Art de la guerre, de Sun Tzu
- Sélection des chapitres de l’Art de la guerre, de Sun Tzu
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