A l’occasion des 5èmes Assises Nationales du Développement Durable et à la demande du Conseil régional Rhône-Alpes, Ipsos a réalisé une enquête auprès de la population française sur sa connaissance, ses convictions et ses pratiques en matière de développement durable. Il en ressort une maturité croissante de la population sur le sujet, non seulement sous l’angle des convictions mais aussi sur celui de l’engagement personnel.
Le développement durable : qu’en sait-on d’abord ?
Consacré par le sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992 et médiatisé depuis cette date, le concept relativement complexe de « développement durable » est un terme aujourd’hui totalement vulgarisé auprès du grand public. L’enquête réalisée en fin d’année 2008 révèle en effet que 97% des Français déclarent avoir déjà entendu parler de l’expression « développement durable ». Le chemin parcouru est grand, ne serait-ce que depuis ces deux dernières années où près d’un tiers de la population ignorait ce concept et, parmi ceux qui disaient le connaître, un tiers seulement déclarait avoir une idée précise de sa signification. Force est de reconnaître que les alertes successives sur la pénurie potentielle des ressources énergétiques naturelles (avec leurs conséquences sur le budget des ménages), tout comme la crise économique, ont largement contribué à cette vulgarisation.
Spontanément, le concept de développement durable connote le plus souvent (cité par près de 2 répondants sur 3) la dimension environnementale mais pas seulement. Pour près d’1 Français sur 4 le développement durable est aussi associé à la sphère de l’économie, à la notion de long terme et, presque dans la même proportion, au champ social.
Sur relance et à partir de choix proposés, pour 87% des personnes interrogées l’environnement est bien le premier domaine concerné par le développement durable, devant l’activité économique et financière (56%) et la solidarité – l’équilibre social (50%). Dans le triptyque – Environnement, Economie, Social – la dimension environnementale est toujours la première citée comme étant concernée par le développement durable, mais de façon beaucoup plus appuyée par les plus jeunes (citée en premier rang par 69% des moins de 35 ans vs 48% par des 60 ans et plus).
En outre, ce qui est vraisemblablement la conséquence des semaines de crise économique précédant la mesure, c’est la restitution par 45% des interviewés, parmi les domaines concernés par le développement durable, du « mode de gouvernance ou façon de gérer de l’Etat, des collectivités et des entreprises ». Etaient ensuite restituées la santé (40%) et, dans une moindre mesure, l’éducation (22%).
Quel est le degré de prise de conscience à fin 2008 de la population ? Est-on prêt à changer de cap ?
Fin 2008, sur fond de crise économique qui exacerbe les sentiments, les Français se montrent particulièrement sensibilisés aux questions environnementale et sociale. Ainsi, 93% des Français jugent la situation préoccupante en ce qui concerne le réchauffement de la planète (parmi lesquels près des deux tiers la jugent vraiment préoccupante). Même constat pour la raréfaction des ressources naturelles.
C’est également dans la sphère sociale que se focalisent les inquiétudes et en premier lieu à propos des inégalités sociales en France dont la situation est jugée vraiment préoccupante par 47% des interviewés et plutôt préoccupante par 44%. Un consensus existe également sur la question du logement (situation jugée préoccupante par 90%), de l’accès à la santé (77%), des conditions de travail (74%) ou plus encore des inégalités entre pays du Nord de la planète et pays du Sud (85%).
Les Français semblent adhérer fortement à une nécessaire mobilisation collective de la population sur l’environnement. Ainsi, 80% reconnaissent que la protection de l’environnement est un sujet crucial et que plus on en parle, mieux c’est. Malgré cette prise de conscience massive, ils ne semblent pas prêts à sacrifier leur emploi pour autant : 42% considèrent que l’environnement c’est important mais que cela doit venir après l’emploi alors que 23% considèrent que l’emploi doit venir après l’environnement et que le tiers restant ne veut pas se prononcer sur cette question.
Au-delà de la problématique de l’environnement, les Français ont pris la pleine mesure des enjeux sociétaux via la nécessaire solidarité envers les populations fragilisées ou la mise en place de programmes de soutien ciblés. Ainsi 86% d’entre eux se disent favorables aux initiatives en faveur de l’entrepreneuriat solidaire (l’aide à domicile pour les personnes âgées ou l’insertion des demandeurs d’emploi), 73% considèrent, certes à divers degrés, que le développement durable ce sont aussi des actions indispensables comme le maintien, voire le renforcement, des services publics et d’intérêt général en milieu rural ou dans les quartiers d’habitat social ou encore, pour 69%, comme la mise en place de programmes de formation et de reconversion pour faciliter la réinsertion sociale des demandeurs d’emploi.
De la prise de conscience au geste concret individuel : une évolution très notable
Si 89% des Français s’accordent sur le fait que chaque individu devrait avoir à cœur de transmettre la planète aux générations futures avec autant sinon davantage de ressources, leurs actes – certes un peu moins en harmonie avec leur conviction déclarée – témoignent d’une évolution notable. 69% disent acheter de plus en plus de produits qui respectent l’environnement et 66% adhèrent au principe selon lequel pour améliorer notre qualité de vie, il faut réduire notre consommation. Un grand chemin parcouru depuis ces dernières années, où seule une minorité adoptait de tels comportements.
Témoignant encore de ces efforts quotidiens, et de comportements écologiques devenus quasi systématiques, 65% de la population déclarent toujours trier les déchets ménagers, 67% disent toujours éviter de prendre des sacs en plastique aux caisses des supermarchés, 59% déposent toujours les piles ou batteries usagées chez les revendeurs plutôt que de les jeter, 39% utilisent toujours des appareils économes en énergie (ampoules basse consommation, appareils électroménagers classe A), 36% limitent toujours les achats de fruits et légumes aux fruits et légumes de saison, 35% rapportent toujours les médicaments périmés ou inutilisés chez le pharmacien, 24% préfèrent toujours un autre mode de transport à la voiture pour des déplacements courts ou quand cela est possible.
Certes, d’autres pratiques restent encore marginales – 8% seulement des Français disent éviter toujours d’acheter des produits parcourant de longues distances à cause de la pollution générée par le transport – et les moyens coercitifs montrent leurs limites, notamment le concept du pollueur-payeur. Ainsi, seuls 14% sont tout à fait d’accord sur le principe d’être personnellement sanctionnés sur un plan financier en cas de non respect des bonnes pratiques en matière d’environnement et 32% plutôt d’accord.
L’action concertée de tous peut-elle permettre d’améliorer la situation pour les générations futures ?
La prise de conscience des Français – des constats sévères et réalistes – s’accompagne toutefois d’une vision optimiste quant à l’efficacité d’une action globale, conjointe de l’ensemble des acteurs : pouvoirs publics, associations, entreprises, citoyens.
Les interviewés considèrent en effet qu’une telle action de l’ensemble des acteurs peut avoir un impact positif pour améliorer la situation des générations futures dans les domaines du logement en France (74% des opinions), de l’accès à la santé (74%), des conditions de travail en France (70%) et des inégalités sociales en France ou encore dans les domaines de l’environnement, en particulier par rapport au réchauffement de la planète (72%).
Un plus grand scepticisme est exprimé en revanche sur la capacité collective à améliorer la situation pour la question de la raréfaction des ressources naturelles (36% n’y croient pas), celle des inégalités sociales (34% n’y croient pas non plus) ou plus encore pour la question des inégalités Nord/Sud (43% ne croient pas à une amélioration de la situation).
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