Selon une étude Ipsos-Bion 3, le rapport que les Français entretiennent avec leur corps a évolué : il ne s’agit plus seulement de plaire aux autres, mais aussi de se sentir en accord et en symbiose avec soi-même. L’accès au bien-être est désormais une condition nécessaire pour être heureux. Or, le niveau de bien-être baisse de façon importante après 30 ans, pour ne remonter vraiment qu’à l’âge de 65 ans.
Rapport des Français à leur corps et à leur bien-être
Quand les Français notent leur bien-être, la moyenne ne grimpe pas très haut : 6,3/10. La meilleure note concerne la capacité du corps à permettre de s’épanouir dans les activités quotidiennes (6,9), soit la définition même du bien-être. Le corps est également bien noté pour son aptitude à résister aux agressions extérieures : se défendre contre la pollution (6,6), supporter les changements de climat, de température (6,5), éliminer les toxines (6,4). Les Français se montrent un peu moins satisfaits de leur corps en ce qui concerne sa capacité à être et à rester tonique (6,3) et à se détendre (6,3). Ils se montrent encore plus critiques sur ses capacités à récupérer, notamment après avoir commis des abus (6,1) ou lorsque l’on est soumis à des épisodes de fatigue ou de stress (6,1). Les notes moyennes chutent encore en ce qui concerne la capacité à rester à un poids idéal ou à le retrouver (5,9), ou à réaliser des efforts sur un temps long (5,7).
Les notes ne sont donc pas très bonnes, malgré une réelle attention des Français à leur bien-être : ils y consacrent en moyenne 8,8 heures par semaine. Ils considèrent être au plus haut niveau de leur forme pendant 153 jours dans l’année (soit environ 5 mois), mais estiment en revanche rencontrer des problèmes ayant des conséquences sur leur bien-être pendant 73 jours, soit environ 2,5 mois. Près d’un Français sur deux (45%) a par ailleurs le sentiment de connaître de fortes variations de son bien-être au cours de l’année. Lorsqu’ils surviennent, les problèmes rencontrés ont un impact important sur la sensation de bonheur (68%), l’épanouissement personnel (67%), l’état de santé (65%) ou encore leur équilibre psychologique (63%). Dans une moindre mesure, les difficultés rencontrées ont aussi des conséquences sur les relations avec les proches (57%), la vie amoureuse et sexuelle (57%) ou encore la capacité à assurer les activités ordinaires (54%).
Près de la moitié des Français affirment avoir entrepris au moins une action destinée à accroître leur niveau de bien-être corporel (45%), le plus souvent dans les 6 derniers mois. L’alimentation (84% des Français y font attention) et l’attention aux rythmes de vie (82%) sont ce à quoi les Français font le plus attention pour entretenir leur corps. Parallèlement, de nouvelles tendances émergent. Plus d’un Français sur deux (57%) affirme pratiquer une activité sportive, même si elle n’est pas toujours régulière. Plus d’un sur trois (36%) consulte des articles ou des livres traitant du bien-être. Un Français sur quatre a déjà consulté un professionnel (26%) ou a consommé des compléments alimentaires spécifiques (23%). Enfin, plus d’un Français sur dix pratique des activités de relaxation comme le yoga, la méditation ou la sophrologie (13%).
Et si le bien-être commençait véritablement après 65 ans ?
A l’heure où le débat sur l’allongement du temps de travail prend de plus en plus d’importance au sein de l’opinion et où la réforme de l’âge de la retraite est en cours, les résultats de l’enquête apportent un angle d’analyse original sur la situation actuelle : le moment de la retraite n’est plus seulement perçu comme un moment où les individus vont pouvoir se reposer tout en gérant les difficultés liés à l’âge, mais bien plutôt comme la période de leur vie où ils vont enfin pouvoir recouvrir un niveau de bien-être plus élevé.
En effet, c’est avant 30 ans et après 65 ans que les capacités du corps sont aujourd’hui perçues à leur plus haut niveau. Dans notre échantillon, les personnes de moins de 30 ans attribuent en effet des notes significativement plus hautes que la moyenne en ce qui concerne la capacité de leur corps à s’épanouir, à se défendre contre les nuisances extérieures, à rester tonique. Les notes sont aussi plus élevées sur la capacité à récupérer, à résister au stress et à la fatigue.
Après 30 ans, on enregistre en revanche une forte baisse du niveau de bien-être des interviewés, sur l’ensemble des domaines testés. L’entrée dans la vie active, les impératifs de la vie domestique ou encore le manque de temps pour s’occuper de soi ont de fortes répercutions sur le niveau de bien-être des individus. On note une légère amélioration de la situation au niveau de la quarantaine (entre 40 et 49 ans), avec une très probable prise de conscience de la nécessité de faire plus et mieux pour son bien-être. Dans cette tranche d’âge, on souligne l’impact des problèmes de bien-être sur la vie professionnelle, la vie amoureuse ou sexuelle. Toutefois, leur niveau de bien-être ne revient jamais au niveau des 15-30 ans. Après 49 ans jusqu’à 64 ans, le niveau de bien-être a globalement tendance à baisser à nouveau avec des fins de vie professionnelle qui deviennent souvent plus difficiles à gérer.
Ce n’est qu’après 65 ans que l’on note une nouvelle hausse du sentiment de bien-être. Alors même qu’ils sont plus âgés que les autres et donc plus souvent sujets à des problèmes de santé plus graves et plus préoccupants que le reste de la population, c’est paradoxalement à partir de cette tranche d’âge que le ressenti du bien-être moyen enregistre de réelles embellies. Les notes attribuées aux capacités corporelles redeviennent supérieures à la moyenne, notamment en ce qui concerne l’élimination des toxines (6,5), la capacité à rester tonique (6,4), à se détendre (6,9), et même pour la capacité à retrouver un poids idéal (6).
Le secret du bien-être des seniors tient dans une recette simple : prendre le temps d’écouter son corps, agir en prévention. C’est la spécificité des plus de 65 ans. Alors que les plus jeunes estiment le plus souvent avoir confiance dans leur corps sans forcément le connaître (59%), près d’un senior sur deux (48%) déclare le connaître parfaitement bien. Il y a là deux modèles différents : l’un axé sur la confiance (celui des jeunes), l’autre sur la connaissance (celui des seniors). Les seniors sont aussi ceux qui considèrent plus que les autres qu’il est facile d’être à l’écoute de leur corps (83%), de le comprendre (80%) et de lui faire confiance (80%). C’est l’écoute et la compréhension qui génèrent la confiance chez les seniors. Et ces critères sont d’autant plus importants chez les plus âgés qu’ils ont conscience que les problèmes de bien-être peuvent survenir à n’importe quel moment de l’année (29%, +5 points par rapport à la moyenne) ou à des moments de l’année liée aux saisons (44%, +10 points). L’enquête montre aussi qu’ils estiment moins souvent que les autres qu’il est facile de savoir comment retrouver la forme après avoir été souffrant (seulement 65%), d’arriver à bien contrôler les problèmes que leur corps rencontre (62%) ou de demander des efforts supplémentaires à leur corps (seulement 43%). Ils agissent donc le plus souvent en prévention.
L’enquête illustre aussi à quel point le bien-être est une question de temps. Les seniors sont ceux qui passent le plus de temps à s’en occuper (11 heures par semaine). En moyenne, les 65 ans et plus ayant mis en place des actions pour accroître leur niveau de bien-être corporel l’ont fait depuis 4 ans (contre un peu moins de 2 ans sur l’ensemble de l’échantillon). Ils font aussi plus attention à ce qu’ils mangent (95%), à leur rythme de vie (96%). Une majorité d’entre eux pratique des activités sportives (57%). Près d’un Senior sur deux affirme lire des articles ou des livres sur la façon d’entretenir son bien-être (46%). Du coup, le niveau de bien-être des seniors est celui qui varie le moins au cours de l’année (seulement 34% disent qu’elle évolue de façon importante).
On constate donc un décalage entre les plus de 65 ans et le reste de la population en termes de ressenti de bien-être. Cette réalité explique pour une part les opinions exprimées sur la réforme des retraites : au-delà d’un report de la fin de leur carrière professionnelle, l’augmentation de l’âge de départ en retraite peut être perçue comme un report de l’accès potentiel au bien-être. A terme, il est aussi possible que cette différence de ressenti entre les seniors et les plus jeunes génère des tensions entre les générations, dans un contexte économique tendu.
Les femmes : un niveau de bien-être moins fort que les hommes
Le bien-être a longtemps été considéré comme un eldorado féminin, traité au sein de la presse féminine via les chroniques, les produits et les services traités. Pourtant, les femmes notent plus sévèrement que les hommes les capacités de leur corps et leur bien-être. C’est le cas sur la capacité à se défendre contre les nuisances extérieures, à résister aux changements de climat, à rester tonique, à récupérer, à résister à la fatigue et au stress ou encore à récupérer et à retrouver son poids idéal. Une femme sur deux a aujourd’hui le sentiment que leur bien-être connaît des variations importantes (49%, +8 points par rapport aux hommes). Elles estiment aussi plus fréquemment que leurs problèmes de bien-être ont des conséquences importantes sur leur bonheur (76%, +4 points par rapport aux hommes), leur état de santé (67%, +4 points), l’équilibre psychologique (65%, +5 points) ou les relations avec les proches (59%, +4 points). Le déséquilibre hommes/femmes s’illustre aussi dans le nombre moyen de jours où l’on rencontre des problèmes de bien-être : 81 jours pour les femmes, soit 17 jours de plus que les hommes. Face à des rythmes et des instants de vie de plus en plus difficiles à concilier (professionnelles, familial, ménagers…), les femmes apparaissent aujourd’hui comme les perdantes de la bataille pour l’accès au bien-être.
Le bien-être dépend des revenus
L’accès au bien-être reste conditionné par le niveau de revenu. Les moyennes générales attribuées au corps en terme de capacité évoluent fortement selon les moyens financiers dont dispose l’interviewé. La note moyenne est de 6/10 dans les foyers dont le revenu net mensuel est inférieur à 1250€ par mois, de 6,2/10 pour la tranche comprise entre 1251 € et 2000 € et de 6,6/10 pour les niveaux de revenu supérieurs (plus de 3000 €).
Par ailleurs, à peine une personne sur trois dans la tranche la plus aisée déclare rencontrer des variations importantes de bien-être au cours d’une même année, contre plus d’une personne sur deux dans la catégorie de revenus les plus modestes. Ces derniers ont aussi plus de mal à entreprendre des actions pour améliorer leur bien-être dans la durée.
En savoir plus : christelle.craplet AT ipsos.com