Depuis une dizaine d’années déjà, le marketing olfactif est une évidence. S’appuyant sur le rôle prédominant de l’odorat dans le processus décisionnel des consommateurs, cette branche du marketing polysensoriel consiste à ajouter, au mix marketing traditionnel, la diffusion d’odeurs dans le but de compléter et d’améliorer des communications uniquement visuelles. Cependant, le marketing olfactif a ses limites en termes de « cacophonie olfactive », de volatilité de l’odeur, de perception et de coût.
Une pollution olfactive
Trop de senteurs repoussent le consommateur à cause des problèmes liés aux allergies ou aux soucis respiratoires. Il peut même en arriver à un état de dégoût face à cette pollution olfactive.
Ainsi, si une seule odeur est diffusée dans un espace donné il n’y a, a priori, aucun problème mais en revanche la multiplication des odeurs dans un même lieu peut être à l’origine d’une « cacophonie olfactive » qui pourrait causer des désagréments à l’acheteur et perturber l’acte d’achat si les odeurs sont incompatibles entre elles.
Il faut donc prévenir la saturation qui peut apparaître avec la multiplicité des odeurs, que l’on retrouve dans les magasins de parfumerie par exemple. A long terme le marketing olfactif devra trouver des solutions et s’adapter pour contourner le phénomène des allergies qui touchent, désormais en France, 1 personne sur 6.
Ce problème commence à faire peur aux grosses enseignes comme Nature et Découvertes qui devront soit diminuer la diffusion d’odeurs, soit l’adapter. La RATP, encouragée par des tests effectués auprès de voyageurs, a lancé en 1993 un programme de neutralisation des odeurs, et diffusé dans certaines de ses stations de la menthe et de l’eucalyptus avant de constater que les utilisateurs n’en supportaient pas l’odeur.
L’odeur pose également un problème au niveau de sa délimitation spatiale dans l’espace, qui de par sa volatilité est impossible.
La volatilité de l’odeur et du goût
Le parfum dispose en effet d’une caractéristique embarrassante, sa volatilité. Une odeur est éphémère et s’adoucit au fil du temps. Toutefois, la pérennité de l’odeur dépend de sa nature chimique, des conditions techniques de diffusion et de son lieu de diffusion. Mais la maîtrise de ces facteurs ne suffit pas pour s’assurer de la survie à toute épreuve de l’odeur. Sa pérennité se heurte également au problème de l’accoutumance. En effet, après quelques secondes d’exposition à une odeur, l’individu n’a plus la sensation de la percevoir réellement.
Diffuser une odeur d’ambiance sur un point de vente, pour suggérer, par exemple, l’exotisme et l’huile solaire des plages d’été pour une agence de voyage, coûtera 500 € par mètre carré et 550 € pour l’espace spécialisé d’une grande surface. Une bijouterie devra sacrifier jusqu’à 2 500 € au mètre carré. Le prix de revient est l’une des raisons qui expliquent, encore aujourd’hui, les réticences des industriels. Ainsi la SNCF, tentée par l’odorisation de ses wagons, a reculé devant le coût excessif de l’opération.
De la perception culturelle…
L’évaluation d’une odeur varie également d’une zone géographique à une autre, en raison notamment de l’existence de différences culturelles. A la vanille, en France, patrimoine issu de nos anciennes colonies, les Américains préfèreront la cannelle. Ce qui implique que le phénomène du choix de l’odeur se pose concrètement de plus en plus, dès lors que les produits odorisés sont commercialisés dans les zones géographiques différentes. Pour choisir leurs signatures olfactives, les firmes ayant un rayonnement mondial devront donc prendre garde aux représentations culturelles des odeurs car les connotations et symboliques sont variables selon les cultures. Il est donc plus prudent de tester les odeurs sur des zones géographiques différenciées, de la même façon que l’on teste la pertinence de noms de marques ou de codes couleurs à un niveau international.
… à la perception personnelle
Un parfum peut-être agréable pour une personne et rebutant pour une autre. Il n’existe pas d’odeur appréciée universellement. De plus la frontière entre attirance et répulsion est difficile à maîtriser. Une odeur est, en effet, source d’interprétation et donc porteuse d’une importante subjectivité de la part de celle ou de celui qui la perçoit. Selon que l’odeur de la lavande ait été associée à un mariage ou un enterrement, le référentiel deviendra positif ou négatif. Le marketing olfactif sollicite souvent des souvenirs lointains afin de réveiller des odeurs ressenties auparavant. Cet élément puissamment évocateur reste par nature très personnel, tributaire d’un conditionnement, d’un apprentissage, d’une culture.
D’après plusieurs études réalisées auprès des consommateurs sur différents parfums, on a pu remarquer qu’ils procuraient une sensation satisfaisante chez certains, et un rejet instinctif chez d’autres. Le seuil entre attirance et répugnance étant subtil et difficile à maîtriser, le maniement de l’odeur reste en effet délicat. Le parfum déclenche des comportements plus intuitifs que rationnels car ils sont en permanence liés avec une chose, un lieu, un individu, une situation ou une période. Dans cet univers l’émotion s’impose d’elle-même, dans un sens ou dans un autre, ne laissant personne indifférent.
Alors, messieurs les marketeurs, même si les techniques de diffusion des odeurs ne cessent de se perfectionner, il semble que l’artificiel n’est pas encore assez performant pour remplacer le naturel…
La quête du retour aux sources est certes lancée, mais sommes-nous vraiment prêts pour franchir la ligne d’arrivée ?
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Auteur : Dominique Michelangeli
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Bibliographie et Webographie
Revues :
- « L’influence des odeurs sur le consommateur : la tendance à la recherche de sensations et au comportement exploratoire comme variables modératrices »
- Revue française de marketing, septembre 2003 par V. Maille
Web :
L’ express.fr
Parfum-indigo.com
Enset-media.ac.ma
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