Femmes Business Angels, unique réseau féminin de Business Angels en France et premier réseau en Europe, réunit exclusivement des femmes qui investissent et accompagnent des start-up, qu’elles soient dirigées par des hommes ou des femmes.
Les investisseuses de Femmes Business Angels (FBA) s’intéressent à un large éventail d’activité et de secteurs, afin de favoriser l’émergence d’entreprises innovantes et à potentiel et les aider à se développer.
Depuis la création du réseau FBA, les Femmes Business Angels ont réalisé près d’une centaine d’investissements (premiers tours et tours suivants) dans 70 start-up.
Réseau convivial et dynamique, FBA souhaite motiver, encourager et former des femmes à participer à l’aventure passionnante des Business Angels. Femmes Business Angels rassemble près de 80 membres actives, et participe à de nombreuses manifestations autour de la création d’entreprise et du développement économique.
Quels sont les critères d’investissement, le ticket moyen investi, les difficultés rencontrées par les Business Angels lors de leur investissement dans les start-ups ? Quelle importance est accordée au plan marketing et au business plan ? Comment optimiser ses dossiers de présentation ?
Témoignage de Florence Richardson (Vice présidente Femmes Business Angels), qui a exercé pendant 15 ans dans le domaine bancaire, puis cofondé sa société en 2002, et de Morgane Rollando (trésorière de Femmes Business Angels) qui, après 15 ans au sein des services financiers de multinationales de l’informatique a créé Synerfia, proposant des services de « DAF à la carte » à des entreprises en forte croissance.
Quelles furent les principales levées de fonds menées par Femmes Business Angels ?
Nous pouvons citer…
- Openways, qui a développé une solution innovante d’ouverture de porte en utilisant son téléphone portable. La solution OpenWays fonctionne sur tous les portables dans le monde et est totalement indépendante de la technologie du mobile.
- Lucibel, une entreprise innovante qui conçoit en France, fabrique dans sa propre usine et commercialise des produits et solutions d’éclairage de nouvelle génération issus de la technologie LED.
- Babyloan, première plateforme européenne de microcrédit solidaire, et propose aux internautes, désirant donner du sens à leur épargne, de soutenir par le prêt des micro-entrepreneurs en recherche de financement
- Etic finance, rénove et gère des centres d’affaires à l’attention des acteurs de l’économie sociale et environnementale. Tous ses bâtiments sont éco-responsables, ouverts sur la vie locale et internationale avec le réseau Ethical Property.
- Muses conçoit, produit et commercialise des véhicules de livraison urbaine à motorisation électrique : les Mooville(s). L’ensemble de ces véhicules sont construits sur la même base roulante mue par 4 moteurs roues électriques.
En somme, quel ticket moyen investissez-vous ?
Chaque Business Angel investit à titre individuel, la structure en tant que telle a pour mission de sélectionner les projets, de présenter les projets sélectionnés aux investisseuses.
Nos membres se regroupent généralement à plusieurs par dossier. Cela leur permet d’optimiser l’instruction, et d’arriver à des montants globaux plus importants. Par ailleurs, les fonds investis en capitaux propres font souvent « effet de levier » pour la start-up (auprès d’organismes de co-investissement, voire de banques).
Le ticket moyen par Business Angel et par projet sur l’année 2012 est de 13k€, en ligne avec les statistiques nationales de France Angels. Le ticket global varie en fonction du nombre de membres séduites par le projet, qui peut aller de 1 à 20. L’investissement le plus important réalisé par les membres de FBA sur une entreprise est de 500k€ en 2 tours.
Quel intérêt accordez-vous au business plan des entreprises cibles ?
Le business plan est un exercice très intéressant car il oblige l’entrepreneur à se projeter sur la durée, à émettre des hypothèses et les traduire en chiffres. Par définition, des projections concernant un nouveau produit sur un nouveau marché sont très difficiles à élaborer. Nous accordons une importance particulière à la réflexion qu’a menée l’entrepreneur sur les hypothèses choisies, plutôt que sur les chiffres eux-mêmes. Une réflexion bien construite lui permettra de rebondir et réorienter ses choix en fonction des réactions de l’environnement. Challenger l’entrepreneur sur son BP permet également de tester sa connaissance de son environnement, sa capacité à défendre sa position, mais également à se remettre en question, et à être à l’écoute. C’est donc une base de dialogue essentielle dans notre processus de décision d’investissement.
Et à leur plan marketing ?
Bien entendu, les éléments d’approche du marché sont primordiaux. Il est important de ne pas minimiser le temps (et les moyens) d’évangélisation du marché, de sa cible. La plupart des projets que nous analysons prévoient une montée en puissance bien plus rapide que la réalité, et sous-dimensionnent les dépenses marketing (ou envisagent un retour sur investissement bien trop optimiste). Un défaut très courant des porteurs de projets est de se concentrer sur leur produit plutôt que sur les attentes de leurs clients pour positionner et marketer leur offre.
Quels sont vos critères de sélection des dossiers puis d’investissements ?
L’équipe – l’équipe – l’équipe. Le critère numéro 1 est la personnalité de l’entrepreneur – ou plutôt des membres de l’équipe qui porte le projet, sa complémentarité, sa crédibilité par rapport au projet présenté, sa connaissance de l’environnement, sa capacité à s’entourer, à choisir des compétences complémentaires (et durables). Nous accordons une grande importante à la capacité de nos interlocuteurs à partager leur réflexion, à écouter, à établir une relation de confiance et de transparence, à savoir se remettre en cause, qualités clé lorsque la société devra faire face aux aléas du marché, réagir extrêmement rapidement et prendre les bonnes décisions.
Ensuite, viennent les éléments techniques et financiers, en évaluant la pertinence des hypothèses posées. Le fait d’étudier les projets à plusieurs investisseuses nous permet d’allier nos compétences et de confronter nos réflexions et nos avis sur un projet.
Quelles sont les difficultés parfois rencontrées lors de vos investissements dans des start-up ?
Les start-up sont confrontées à de nombreuses difficultés et le chemin à parcourir est semé d’embuches ! Au stade de l’amorçage, tous les éléments constitutifs d’une société sont fragiles, et un manquement d’un partenaire, d’un salarié, d’un fournisseur, ou d’un membre de l’équipe fondatrice peut être fatal. Pour les projets en rupture, qui apportent un service ou un produit très innovant, nous constatons très souvent une mauvaise estimation du « time to market » et des efforts à fournir sur un marché qui n’est pas mature.
La principale difficulté reste … le cash et encore le cash. Quasiment tous les BP proposent une anticipation trop faible des charges, et une vision très optimiste de l’évolution du CA, ce qui amène à une consommation plus rapide des fonds levés. De ce fait, les investissements sont ralentis et le plan de développement en souffre encore plus, dans l’attente d’une nouvelle levée de fonds. En fonction de l’intérêt du projet, cette levée pourra se faire dans de bonnes conditions, parfois dans des conditions plus difficiles … et parfois pas du tout !
Une autre difficulté réside dans le fait que le management a souvent du mal à prendre du recul, détecter les impasses, ou adopter une vision stratégique à plus long terme. C’est un point sur lequel le comité stratégique doit avoir un rôle décisif en l’aidant à « sortir la tête de l’eau » régulièrement et se poser les bonnes questions.
Compte tenu de l’orientation du marché, comment sécurisez-vous vos investissements… tout en ne vous coupant pas des opportunités ?
Nous avons un process de sélection rigoureux, puisque sur environ 300 projets reçus tous les ans, nous n’en financerons au final qu’une douzaine. Notre analyse à plusieurs nous permet de mettre en commun nos connaissances des secteurs concernés, nos compétences, et confronter nos opinions. Nous proposons à toutes nos membres, lorsqu’elles rejoignent le réseau, une formation aux spécificités de l’investissement en tant que Business Angel.
Nous essayons de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier, en investissant dans plusieurs projets, plutôt que de miser un gros montant (à titre individuel) sur une seule entreprise.
Nous sommes toutes conscientes qu’au stade de l’amorçage, il est question de beaucoup d’intuition, bon sens, compatibilité entre entrepreneur et investisseur, mais que le risque est présent en permanence et pendant plusieurs années après l’investissement. C’est pourquoi nous nous investissons après la levée de fonds, en participant au comité stratégique et accompagnons nos start-up bien au-delà de la période de levée de fonds. Et c’est d’ailleurs souvent pendant ces étapes de développement de l’entreprise, de difficultés rencontrées, mais également de succès, que c’est le plus passionnant !
Quelles sont vos prévisions d’investissements pour 2014 ?
Nos capacités d’investissement sont allées croissantes depuis plusieurs années, notamment avec l’accroissement du nombre de nos membres.
Nous investissons entre 12 et 14 projets par an.
Quels conseils inédits donneriez-vous à une entrepreneuse en recherche d’investisseurs ?
Essayez de comprendre la vision de l’investisseur, savoir ce qu’il attend de l’investissement.
L’apport du BA est un effet de levier, en terme financier, mais aussi en termes d’accompagnement stratégique
Établissez une relation de confiance. Si celle-ci n’existe pas au départ, ça ne fonctionnera pas après l’investissement.
Sécurisez un premier noyau d’investisseurs – BA privés, BA en réseau, qui ont bien compris votre business model et rassureront les autres investisseurs. N’hésitez pas à les mettre en relation au plus tôt, vous gagnerez en temps et en efficacité.
L’intervention de Business Angels a un double effet de levier : financier, mais aussi en terme d’accompagnement stratégique. Réfléchissez en amont à votre gouvernance et ce qu’elle peut vous apporter : composition de votre comité stratégique, rôle pivot de certains acteurs-clés
Démontrez que même si vous pilotez une start-up, vous avez de bons outils de pilotage, que vous les utilisez, et que vous saurez les partager avec votre futur Comité Stratégique. L’investisseur a besoin d’être rassuré. Une information fiable et rapidement disponible, même si elle n’annonce pas que des bonnes nouvelles, permet de réagir rapidement.
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Un article de notre dossier Business Angels et financement de startups
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