L’excellent blog Econsultancy a publié il y a un mois une remarquable interview des artisans de la politique nouveaux médias de l’hôtel new-yorkais Roger Smith. Cette politique marketing est un exceptionnel cas d’école de ce qu’il faut faire dans ce domaine.
Fondé dans les années 1930 à New York, l’hôtel Roger Smith est un établissement indépendant. C’est du reste plus qu’un hôtel : il donne table via son restaurant, des concerts de jazz s’y tiennent, des œuvres d’art y sont exposées et des événements artistiques y sont organisés. Le dirigeant est particulièrement engagé sur cette voie culturelle. L’équipe en charge des nouveaux médias est composée de deux personnes.
Compte-tenu de la pléthore d’hôtels haut de gamme à New York et de la puissance financière des chaînes comme Hilton, Sheraton et consorts, comment tirer son épingle du jeu ? – C’est à dire : comment être présent à l’esprit de ses prospects et clients et développer les ventes.
Stratégie retenue
La stratégie retenue est de construire et de développer l’identité de la marque en créant une communauté de prospects et de clients au moyen des réseaux sociaux. Cette stratégie se traduit par quatre objectifs :
- inciter les internautes à nouer une relation durable avec la marque
- inciter les internautes à parler de l’hôtel
- inciter les internautes à échanger entre eux
- inciter les internautes à venir à l’hôtel.
La mesure des résultats
La mesure des résultats porte sur la visibilité de la marque, la participation des internautes (engagement) et les ventes. Un rapport mensuel est édité à cette fin et les outils de Web Analytics utilisés sont des sondages (via le Web ou simplement des questions aux personnes rencontrées) et des solutions qui pourraient être Google Analytics pour les sites Web, ces outils pour Twitter ou ceux-ci pour Facebook.
Actions mises en place
Plusieurs actions ont été conduites afin d’atteindre les objectifs.
Tout d’abord, Roger Smith s’est rendu accessible sur les réseaux sociaux où les internautes passent le plus de temps : une page Facebook, un compte Twitter, une chaîne YouTube et un blog ont été crées. Ces outils servent à :
- diffuser du contenu : menus du restaurant, vidéos des événements, actualité de l’hôtel…
- encourager les internautes à devenir fans en y diffusant des réductions exclusives
- échanger directement avec leurs fans. Par exemple, sur Twitter : @sarahcooley & @drew We miss you two as well !!!! Love from NYC !
- permettre aux fans de commenter les contenus, d’en publier eux-mêmes (photos, vidéos…) ou de discuter entre eux.
Roger Smith a organisé de nombreux événements relatifs aux réseaux sociaux : ils organisent un petit-déjeuner avec le Social Media Club, une fête avec Mashable, une rencontre avec Gary Vaynerchuk… Il a aussi organisé des événements liés à l’activité culturelle de New York.
Lorsque ces internautes viennent à l’hôtel, que ce soit pour des événements ou pour une chambre, l’équipe marketing se fait un point d’honneur de les rencontrer, d’échanger avec eux puis, après leur départ, de leur envoyer un message amical sur l’un des réseaux sociaux qu’ils fréquentent.
Des résultats probants
Les résultats sont probants. L’hôtel a enregistré un fort taux d’occupation lors des différents événements organisés. Ces événements ont également contribué à faire de l’hôtel un acteur qui compte au sein de la communauté culturelle new-yorkaise. Enfin, des centaines d’internautes sont devenus des ambassadeurs de la marque. D’une manière générale, l’équipe affirme que s’il n’est pas toujours aisé de mesurer le ROI de toutes les actions, ils voient nettement que compte-tenu du contexte économique difficile, des performances des hôtels concurrents et, par contraste, leur taux de remplissage, cette politique est un succès.
Enseignements à tirer
Les leçons que l’on peut retirer de cette politique sont très importantes pour toute marque qui souhaite faire des réseaux sociaux un levier fort de sa stratégie.
Être passionné par ce que l’on fait. Qu’il s’agisse d’art, de gastronomie ou de quoi que ce soit d’autre, c’est la passion qui doit être à l’origine. La passion seule est communicative, elle seule est capable de créer des fans.
Aimer les gens. Ce n’est pas qu’une question d’outils, qui ne sont que des moyens. Comme le dit un membre de l’équipe : « I love them! I love everyone who follows us ». Si les internautes ne sentent pas cette sincère affection, il y a peu de chance qu’un communauté de fansse crée autour de votre marque.
Rencontrer les gens. Un des membre du tandem a constaté que les relations les plus fortes sont celles où il y a eu rencontre physique. Pour le citer : with all the social tools out there today, without the face-to-face connection we aren’t generating a friend. You learn so much more in a personal conversation than in 140 characters. Dans le cas de Roger Smith, cela se traduit par la réhabilitation de ce beau mot d’hospitalité. De façon remarquable, ils citent le cas de la chaîne Marriott dont la politique sur les réseaux sociaux est remarquable mais, lorsque les clients arrivent sur place, pas d’accueil par les employés, rien, ce ne sont plus que des clients lambda.
S’enraciner dans la vie locale. Pour que la politique virtuelle prospère, elle doit prendre racine dans la réalité et s’y développer aussi. Le online et le offline s’alimentent et se fortifient.
Rendre à la communauté. Les événements avec Mashable, le Social Media Club, etc. sont judicieux. Au delà du fait qu’ils touchent des influenceurs qui parleront de l’hôtel, ils sont dans l’esprit de l’Open Source où si l’on prend, il faut donner aussi.
Modestie. La dernière chose à faire est de vanter sa marque, ses mérites, etc. Bien plutôt, si votre politique est conduite avec justesse, ce sont vos fans qui le feront.
Raconter des histoires (storytelling). Plutôt que de vanter sa marque, raconter des histoires (rencontres, recettes…), parler des événements afin que les gens les diffusent et y réagissent.
Agilité et rapidité. Selon Roger Smith, c’est un avantage d’être une petite structure indépendante : pas de procédures et autres lourdeurs qui sont antinomiques avec la « vivacité » des réseaux sociaux.
Enfin, flexibilité par rapport à un discours de marque. Être naturel, réactif, sincère, et tant pis si tel ou tel contenu malmène la charte graphique ou une quelconque directive d’entreprise.
On pourrait conclure de bien des façons. Ainsi, je pense qu’une politique d’envergure sur les réseaux sociaux est susceptible d’avoir un impact profond sur l’organisation et la culture de l’entreprise. Je doute par exemple qu’elle rencontre le succès dans une société ou le management serait caporaliste ou procédurier. Toutefois, je laisserai le mot de la fin à une fan qui, sur Facebook, s’écrie :
Oh you are so much more than a Hotel… a door to a world rather.
Francis Bélime
17 octobre 2009 à 15:09
Très bon exemple et un bon cas d’école pour pas mal de PME qui voudrait lancer une stratégie de comm. en s’appuyant sur les outils web2.0.
Cordialement.
Youssef Rahoui
18 octobre 2009 à 20:58
Merci Francis 🙂
Murielle FRAMBOURT
22 octobre 2009 à 13:02
Quel dommage que mon module sur le web social à l’ESSCA soit terminé…GGRRRRR !! Mais heureusement je dois me pencher très bientôt sur le cas d’un hôtel***** en France… de quoi m’aérer les neurones et ouvrir sur un benchmark à l’étranger. Merci pour cette mise en ligne. Le mot de la fin peut faire envie à tout établissement qui se respecte…Murielle FRAMBOURT – Consultante et intervenante
Youssef Rahoui
22 octobre 2009 à 19:33
Merci Murielle 🙂 En effet, ces mots sont le couronnement idéal de leur politique !
Matthieu GAUDICHAU
26 octobre 2009 à 18:48
Bravo pour cet article. La synthèse du cas est efficace, mais ce qui me réjouit encore plus c’est le fait que tout ce que j’essaye de faire passer dans mon travail se vérifie une fois de plus chez d’autres !! Comme quoi je ne suis pas seulement un idéaliste ^^
Et le problème majeur de cette tactique, que vous avez d’ailleurs évoqué, c’est la cohérence entre les actes et le message délivré via tous les outils 2.0 à disposition !
Youssef Rahoui
26 octobre 2009 à 19:16
Merci Matthieu. En effet, c’est quand il faut « mettre de sa peau », ce qui est indispensable dans ces nouveaux médias, que le bât blesse souvent.
Ange Pozzo di Borgo
4 novembre 2009 à 18:41
Excellent article. A ce sujet, j’en profite pour vous inviter à participer au jeu-concours http://laquestiondigitale.ntmy.fr/. De nombreuses dotations sont à gagner pour les professionnels qui souhaitent développer leur communication via les médias sociaux.
simplice K
6 novembre 2009 à 10:40
Très bon article. Tout à fait d’accord avec vous lorsque vous parlez des entreprises procédurière. A ce niveau, je crois la réussite d’une telle stratégie réside dans l’acceptation par l’ensemble de l’entreprise. Surtout le Top Management.
Sa disposition à accepter l’innovation pourrait être un déclic.
Isabelle DUPRE
30 novembre 2009 à 15:53
Excellente étude de cas qui prouve, une fois de plus, l’importance des réseaux sociaux pour tirer son épingle du jeu dans le e-marketing. Fédérer une communauté autour de sa marque ou son savoir faire permet d’humaniser ses relations avec l’extérieur, d’apporter le petit supplément d’âme qui fera toute la différence !
A lire absolument sur le même thème : mon réseau social, c’est mon blog par Eric Dupin de Presse Citron.
@ Bientôt Isabelle
Youssef Rahoui
1 décembre 2009 à 9:46
Merci Isabelle, et je vais essayer de jeter un oeil à l’article d’Eric.
Cécilia
30 avril 2010 à 14:14
Bonjour,
Je suis étudiante en Master en création multimédia, à l’école de communication et publicité SUP de Pub Paris. Dans le cadre de mes études je dois rendre un mémoire de recherche.Mon mémoire aborde comme thème le marketing participatif comme one to one de masse, la customisation, les réseaux sociaux, la génération Y. Ma problématique : Comment exploiter l’envie de participation de la génération 2.0 dans le cadre d’un marketing de masse?
J’ai eu votre contact par le biais du site marketing-professionnel.fr. Etant spécialiste dans le domaine du marketing je vous contacte pour connaître votre avis sur le sujet.
Le marketing participatif constitue t-il une véritable innovation dans la mise en considération du consommateur ou n’est-il qu’un moyen de plus pour tenter de le connaître d’avantage ? Comment exploiter le marketing participatif pour des produits de consommation de masse? Dans quelles mesures le consommateur est-il prêt à accepter ? En quoi le consommateur est devenu plus réceptif au marketing participatif ? Quelles solutions, quelles perspectives ? Les risques et les limites du marketing participatif ? Les conséquences sur les métiers en agences, principalement sur les créatifs ?
Je vous remercie d’avance de m’avoir accordé un peu de votre temps.
Espéranr avoir une suite favorable à ma demande, je vour prie d’agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Cécilia
Rémy Bigot
16 décembre 2010 à 11:56
Un très bon cas d’école qui monter bien que ces réseaux demandent une manière de communiquer radicalement différente.
Certains ont beaucoup de mal encore, et communique sur Facebook comme ils le feraient à la TV ou à la radio, c’est une erreur !
Christophe
28 janvier 2011 à 17:41
Très bien ! « Être passionné et envie de partager » : c’est peut être la meilleure des stratégies Web pour les PME. La communauté arrivera d’elle-même.
socialmediateur
17 juin 2011 à 14:17
Une étude de cas pertinente qui met en avant de façon pertinente l’utilisation des réseaux sociaux dans le cadre d’une PME. Pour d’autres exemples de petites et moyennes entreprises ayant réussi sur les réseaux sociaux, nous nous permettons de vous conseiller la lecture de notre blog: http://www.socialmediateur.fr
Bonne continuation!