Dans un monde où tout va de plus en plus vite et où l’obsession du temps régit nos conduites, les nouvelles technologies tomberaient-elles à point nommé pour nous aider à lever le pied ? Focus sur les Slow Tech, cette innovation qui voudrait nous faire ralentir.
Les Slow tech font partie d’un mouvement global favorisant la lenteur. Ce mouvement touche tous les domaines, allant de la slow food (fini le micro-ondes, retour à la cuisine traditionnelle de Mamie) en passant par le slow sexe (je vous laisse faire gambader votre imagination) jusqu’aux slow cities (des villes où il vaut mieux être piéton et ami avec ses voisins).
L’idée générale de ce mouvement n’est pas d’entrer en guerre contre nos sociétés capitalistes, ni de mettre la planète sur pause. Voyons-le plutôt comme une philosophie de vie qui vise à ralentir pour se sentir mieux, plus serein, se recentrer sur l’essentiel et de s’ennuyer sans paniquer à l’idée de ne pas être productif.
Entendons-nous bien sur le fait que le mouvement slow ne veut pas dire aller littéralement plus lentement, ce qui signifierait contrôler encore et toujours son temps. Non, ici il s’agit d’oublier sa montre, d’aller à la vitesse de son choix, de laisser le temps au temps et de ranger le radio-réveil dans le placard du fond.
Slow et Technologies, un duo atypique
C’est dans cette tendance que les slow technologies s’inscrivent. Les slow tech sont conçues dans l’idée de nous mettre face à nos propres addictions aux technologies. Parmi ces slow tech, nous pouvons trouver un minuteur qui coupe les réseaux sociaux quand le temps imparti est écoulé, un casque qui permet de voir la vie en slow motion ou encore un Ipad qui se recharge uniquement avec l’énergie cinétique produite par le balancier de votre rocking chair préféré (Irock).
Peter Drucker, théoricien du management, parlait d’innovations pas toujours synonymes de progrès et nous invitait à faire le distinguo entre les nouveautés, facteur d’amusement, des innovations qui créent de la valeur.
L’Irock ou l’application qui permet d’envoyer des cartes postales créent-ils de la valeur ? La technologie, sous couvert de progrès, peut se révéler être une fausse-amie.
Le Temps, comme une obsession
Que l’on soit sceptique ou fan de la première heure des slow tech, force est de constater qu’elles tentent de répondre à un véritable phénomène sociétal. Depuis la révolution industrielle, l’homme a démultiplié ses possibilités de voyager, de travailler, de communiquer allant toujours plus vite toujours plus loin.
Ce besoin croissant de vitesse a d’ailleurs été décrit d’une manière assez limpide par le fondateur et président du forum économique et mondial Klaus Schwab : « Nous troquons un monde dans lequel le gros mange le petit pour celui où les plus rapides mangent les plus lents »
Sommes-nous encore capables de ne rien faire, de patienter, perdre du temps, de nous languir sans culpabiliser, d contempler sans s’ennuyer ? Pourquoi cette obsession pour la vitesse ?
Marc Kingwell, professeur de philosophie à l’université de Toronto, a formulé une réponse en ces termes : « En dépit de ce que pensent les gens, le débat à propos de la vitesse ne se joue pas sur l’état actuel de la technologie. L’enjeu est bien plus profond et s’ancre dans le désir humain de la transcendance, dit-il. Il est difficile d’envisager l’idée que nous allons mourir, c’est déplaisant et c’est pourquoi nous cherchons constamment des moyens de nous distraire de la conscience de notre propre mortalité. La vitesse dans l’ivresse sensorielle qu’elle procure, est une stratégie de distraction».
Pouvons-nous choisir de décélérer dans une société où le « marche ou crève » est plus que jamais la norme ?
Auteure : Héloïse Vachon
***
Un article de notre dossier Marketing & innovation
(c) ill. Shutterstock – Gourmet Caramel Pecan Turtles made with milk chocolate