Avec un marketing direct générant la grande majorité de ses ressources, comment le Secours Catholique a-t-il pris avec brio le virage du digital ? Précisions avec Marie-Carmen Carles, Directrice Générosité et Philanthropie.
Le marketing direct sur la cible des donateurs est-il toujours aussi efficace ?
Le marketing direct représente aujourd’hui 80% de notre collecte environ et il touche à la fois nos donateurs par des stratégies de fidélisation, réactivation et de prospection, pour toucher des cibles proches de nos donateurs. Sur la prospection-conquête, les rendements sont plutôt en baisse du fait de la forte concurrence. Avec les années, la conversion de nouveaux donateurs au don au SC devient de plus en plus difficile, surtout pour des organismes comme nous qui sommes déjà importants et matures. Sur la fidélisation, c’est sur le développement de la contribution de chaque donateur que nous agissons. En ce qui concerne le télémarketing, nous l’avons principalement réservé à des opérations de réactivation ou de conversion au prélèvement automatique. Si nous faisons prochainement des opérations de recrutement par téléphone, elles seront limitées et donc la nouvelle réglementation ne devrait pas trop nous pénaliser.
Comment augmenter la part des dons générés via Internet ?
En travaillant sur la qualité de notre site (attractivité des sujets, ergonomie, etc..), mais aussi en mettant en œuvre des campagnes de publicité dédiées (display, adwords,..) et plus en amont, des campagnes réseaux sociaux, pouvant créer du trafic sur le site puis de la conversion au don. Enfin une stratégie marketing relationnelle associant des e mailings, mais également en développant notre propre plateforme de crowdfunding , un espace donateur…
Les dons par Internet concernent-ils les cibles traditionnelles de l’association ?
L’âge moyen de nos donateurs est assez élevé. Les dons par internet concernent à la fois de nouveaux publics de donateurs (notamment au moment des urgences), mais surtout des donateurs traditionnels sollicités par courrier et qui de plus en plus finalisent leur don en ligne. C’est toutefois une frange plus jeune de nos donateurs qui est encline à se convertir au don en ligne. Aujourd’hui, nous n’avons pas un traitement différencié exclusivement digital vers des cibles considérées comme pure on-line, mais nous pratiquons une stratégie mix-canal sur l’ensemble de nos cibles.
Quel est votre principal outil de marketing digital en matière de recrutement de donateurs individuels ?
Ce sont nos campagnes display et réseaux sociaux, mais aussi notre plateforme de crowdfunding, qui est en cours de déploiement. Notre objectif est la faire connaître des membres de notre réseau pour qu’ils deviennent des collecteurs et des ambassadeurs de cet outil.
Comment mesurez-vous l’efficacité des campagnes marketing et communication que vous menez ?
Nos campagnes marketing sont toutes codées et nous mesurons ainsi sur chacune d’elle, le retour direct et le retour indirect (les personnes ayant reçu l’appel concerné mais ayant fait leur don sans bulletin retour, ou par web,..) et nous le comparons au coût pour en tirer le ROI.
En ce qui concerne la communication, nous faisons des pré-tests et des post tests sur les campagnes principales et nous avons à l’étude un baromètre d’image.
Comment mesurez-vous le ROI des opérations menées ?
Les mesures d’efficacité concernent tous les outils. Au-delà du ROI et des indicateurs de performances de campagne (taux de retours, cout d’acquisition, don moyen…), nous analysons selon différents axes (profil de donateur, temporel, géographique, origine des dons, mode de soutien…) les évolutions de volumes de souscriptions, taux d’activité, montants des soutiens, et suivons avec attention la valeur générée dans le temps par chaque donateur.
Pour le web, nous pratiquons autant que possible l’AB testing sur les campagnes et nous avons un système de tagage pour mesurer l’efficacité en termes de conversion des différentes rubriques du site.
Quelle OP marketing récente pouvez-vous ériger en business case incontournable ?
La mise en place de la plateforme de crowdfunding « mondonadusens.secours-catholique.org »: pour le financement de petits ou moyens projets, pour impliquer notre réseau, pour élargir nos cibles de prospects, à l’occasion d’évènements de notre association ou au contraire à l’occasion d’évènements de la vie des collecteurs et de leur réseau de donateurs potentiels (mariage, anniversaires, courses, …). Mais nous en sommes encore aux balbutiements.
Nous expérimentons en ce moment une campagne display ciblée. Depuis plusieurs années nous travaillons avec AMNET (RTB). Mais nous testons cette année un ciblage scoré à partir de notre fichier donateurs : des bannières apparaîtront sur les devices de nos donateurs et sur ceux de prospects aux profils proches.
Le marketing est-il « soluble » dans le caritatif ?
Si la plupart des techniques marketing sont transposables au caritatif moyennant quelques ajustements, le caritatif a du mal à l’assumer. Problème de culture, le sentiment de pouvoir perdre son âme en allant chercher de façon trop « commerciale » les ressources de l’association. Donc les freins internes (gouvernance comme réseau) sont une donnée sur laquelle il faut travailler pour faire avancer le marketing dans le caritatif, au bénéfice de nos causes, tout en respectant notre déontologie.
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Un article de notre dossier Marketing & secteur caritatif
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