2015 sera l’année des objets connectés avec une croissance exponentielle du nombre d’unités vendues dans le monde, rapporte GfK, une nouvelle révolution industrielle serait même en marche. Cependant les intentions d’achat des consommateurs restent très modestes, seuls 12% des français envisagent d’en acquérir un dans les trois prochaines années (étude Ifop décembre 2013) et le marché ne pèse pas encore bien lourd avec seulement 640 000 objets vendus en 2014. Que pensent véritablement les français de ces nouveaux produits connectés ?
Les craintes des utilisateurs des Objets Connectés
Aujourd’hui le consommateur connecté a la possibilité de surveiller sa maison à distance, de porter un bracelet pour mesurer la distance qu’il a parcouru dans la journée et pour mesurer son rythme cardiaque ou de porter une montre pour consulter ses mails… il a désormais l’opportunité de passer d’un être connecté à un individu hyper connecté. Cependant 48% des utilisateurs pensent que ce sont des gadgets inutiles (enquête Que Choisir décembre 2014) et 77% des français déclarent ne posséder aucun objet connecté (enquête Ifop novembre 2014). Quelles sont les principales sources d’inquiétudes ?
Données personnelles
L’ère du tout connecté est installée et l’utilisation des données personnelles des utilisateurs accumulées par le biais des objets connectés inquiète. Selon l’étude Havas Média, 78% des internautes pensent que cela pourrait nuire à leur vie privée : la grande quantité d’informations collectées ainsi que la géolocalisation permettent de croiser des données pour connaître toute la vie d’un utilisateur. 9% des Français estiment que les entreprises qui les hébergent «ne garantissent pas une protection infaillible de la vie privée des utilisateurs», 65% trouvent par ailleurs «gênant que ces données puissent être consultées par les services de renseignements et de police» et 90% qu’elles puissent être utilisées à des fins commerciales (étude Crédoc Juin 2014).
L’intrusion par des cybercriminels est une source d’inquiétude. La sonnette d’alarme a été tirée par la Federal Trade Commission (une agence de surveillance indépendante du gouvernement américain) sur la protection estimée non suffisante des données collectées par les objets connectés selon son rapport publié le 27 janvier 2015. Elle conseille aux entreprises d’améliorer la cybersécurité de leurs appareils afin de protéger les utilisateurs et de les prévenir sur l’utilisation exacte faite par l’entreprise de leurs données. Pour l’agence, il faut mettre en place la sécurité dès la conception (« security by design »), minimisant la collecte de données et améliorant la transparence et l’information des consommateurs. La présidente de la FTC, Edith Ramirez a bien compris l’importance de ce problème et juge « Selon moi, ces étapes seront la clé du succès des business models de l’Internet des objets et de la protection des consommateurs ».
Prix élevé et produits pas assez fonctionnels
Le prix est l’un des principaux freins d’achat pour 59% des français (Ifop novembre 2014) mais pas seulement. La faible autonomie et la fonctionnalité moindre y joue grandement.
Prenons l’exemple de la montre et du bracelet connectés qui sont des blockbusters avec plus de 51 millions d’exemplaires dans le monde cette année, contre 17,6 millions en 2014, selon des chiffres communiqués par GfK. Cependant un tiers des utilisateurs les abandonneraient dans les six mois suivants l’achat ne voyant pas les bienfaits de ceux ci. Les français sont beaucoup moins friands que leurs homologues étrangers, 64% d’entre eux n’ont pas l’intention d’acheter une smartwatch dans les 12 prochains mois et seulement 1,2% possède déjà une montre ou un bracelet connectés (Etude Kantar février 2015). Quelles sont les raisons ? Simplement, 58% des français ne leur trouvent aucune utilité et 30% d’entre eux pensent que leur prix est bien trop élevé, ils estiment qu’ils pourraient investir seulement jusqu’à 200 euros maximum pour en acheter un (sachant que le tarif moyen pour ces produits high-tech se situe entre 300 et 400 euros).
L’inquiétude ne suscite-t-elle pas un désir caché ?
L’homme achète les objets connectés pour résoudre une partie de ses inquiétudes (rapport au temps, au corps…). Il est probable que l’achat des objets connectés n’ouvre la porte qu’à de nouvelles interrogations… et incertitudes. Selon Leibniz : « L’inquiétude est le principal, pour ne pas dire le seul aiguillon qui excite l’industrie et l’activité des hommes ; car quelque bien qu’on propose à l’homme, si l’absence de ce bien n’est suivie d’aucun déplaisir ni d’aucune douleur et que celui qui en est privé puisse être content et à son aise sans le posséder, il ne s’avise pas de le désirer et moins encore de faire des efforts pour en jouir.” extrait des Nouveaux Essais. Le philosophe nous indique dans son ouvrage que l’être humain est en permanence stimulé à chercher des biens qui amélioreraient leur condition. L’inquiétude pousse les hommes à se dépasser pour inventer toujours plus et être dans le progrès. L’objet connecté serait-il une mise en abîme de nos inquiétudes ?
Auteure : Camille Ziegler
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Un article de notre dossier Marketing des objets connectés
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