L’IoT a changé le « management de soi ». Les entreprises, sensibles à cette évolution, vont adopter cette technologie afin d’améliorer le quotidien des salariés. Mais sont-elles réellement préparées à la révolution numérique ?
L’avenir des objets connectés sur le marché BtoB en France
L’année 2015 sera marquée par l’arrivée de multiples objets connectés destinés à plusieurs domaines. Un engouement, qui va susciter une grande curiosité de la part des consommateurs, comme des marques qui vont oser franchir le pas. Ce succès, se traduit par l’accélération des rythmes dans notre société, souvent liés à l’ordre économique. Cela, conduit alors à une explosion d’accessoires et d’objets possédants des capteurs et ayant de multiples fonctions. Un marché d’offre qui devient avec le temps un marché de demande. Karl Marx, n’avait peut-être pas prédit « l’IoT » mais il avait déjà compris que l’objet en lui-même devenait « l’enjeu économique premier de l’ère industrielle ». En effet, le chiffre d’affaires de l’année 2015, tournera autour de 400 millions d’euros, selon l’institut GFK. Sans compter, qu’en 2020, il est annoncé plus de 2 milliards d’objets connectés disponibles sur notre marché. Un avenir prometteur pour les objets connectés destinés au BtoB, dont l’enjeu réel existe.
La société contemporaine est caractérisée par sa constante volonté de s’adapter à une « conjoncture » qui est à chaque fois redéfinie, comme nous l’explique Zygmunt Bauman, dans La vie liquide. On peut alors se demander, ce que ces techniques vont pouvoir apporter aux entreprises en matière de valeurs ajoutées, maintenant qu’il y a un véritable marché à conquérir.
Un management amélioré, voire repensé
Afin d’améliorer la gestion « technique » d’une entreprise, des équipements dotés de capteurs sont installés, afin d’automatiser les systèmes et rendre le bâtiment plus intelligents (énergie, sécurité, etc.). Ces capteurs qui ont le mérite de jouer le rôle du « small brother », vont récolter des données, qui seront analysées afin d’anticiper certains événements. Ainsi, utilisés dans un premier lieu pour sécuriser et gérer les locaux de l’entreprise, ces capteurs deviennent un sujet de discussion pour d’autres pratiques, comme le management.
Les entreprises se doivent de ne pas « manquer le train du progrès » (Zygmunt Bauman, op. cit.). Ainsi, repenser le management interne de l’entreprise en intégrant les objets connectés, est peut-être une manière de remettre l’humain au centre (ou pas). Organisation, cadre et relation au travail sont réétudiés afin d’améliorer le management des salariés. Certaines grandes entreprises, sont dans cette volonté de changer progressivement, en 2015, pour devenir des entreprises numériques, pionnières dans leur domaine grâce à un management interne revisité. C’est le cas de l’entreprise de télécommunications Orange. En effet, Bruno Mettling DGA et DRH, tentera la transformation interne du groupe. Une opportunité à saisir ou un changement inopérant ? Il est certain que la société moderne liquide, se caractérise par l’expérimentation (Zygmunt Bauman). L’entreprise tout comme le salarié, doivent aujourd’hui, vivre l’expérience.
On retrouve ainsi, des objets connectés pour contrôler l’accès, guider rapidement jusqu’à la destination les salariés, mais aussi des équipements connectés, comme des casques de chantier et des lunettes pour les métiers du transport. Dans le domaine de la santé les experts réfléchissent, déjà, à des bracelets connectés pour réduire les frais de santé. La nécessité de prévoir, reste l’un des objectifs principaux.
L’IoT, pour accompagner autrement le salarié
Le « quantified self », s’est très vite développé, grâce à la consommation d’objets connectés bien-être et santé, par le grand public. Les entreprises, elles, se sont emparées du « quantified other ». Une autre façon de mesurer, la productivité, le temps de travail et bien d’autres paramètres. Une étude Cisco réalisée en 2013, révèle que l’IoE permet « de renforcer l’efficacité des collaborateurs ce qui implique une réduction du nombre d’heures de travail nécessaires et une plus forte productivité du personnel », laissant ainsi la possibilité au salarié de s’organiser, et de travailler autrement (télétravail, etc.). Il faut maintenant espérer que le monde du travail ne tombe pas dans une autre forme d’assistanat en utilisant ces objets, dans les années à venir.
Z. Bauman, a souvent soulevé la question de la valeur de l’objet et du rapport à l’homme. Il est possible que d’ici à 2020, l’être se transforme en objet de consommation, et cette fois-ci par le biais des objets connectés. En effet, le salarié consomme l’objet intelligent, tout comme l’entreprise par cette même occasion consomme la « productivité » du salarié. Cela se produit, lors de la récolte des données et de son utilisation. Seul « l’utilité » permet à l’être humain d’être considéré, autre qu’objet, que cette utilité soit importante ou non. Si les entreprises ne tombent pas dans les dérives de ces nouvelles utilisations, les objets connectés seront les « nouveaux meilleurs amis » des salariés. Entre accompagnement et complémentarité, l’IoT, pourrait bien améliorer la productivité, et faciliter le quotidien.
Les limites posées par les entreprises
Zygmunt Bauman faisait le rapprochement entre « le temps libre » et le fait que le salarié échappe au rapport de domination, qui existe encore au sein de notre société. Mais, si les objets connectés s’installent dans le quotidien des salariés, comment pourront-ils préserver leur liberté individuelle ? Par ailleurs, la démocratisation de l’utilisation de ces objets et l’impact que cela a sur la vie des utilisateurs, va entrainer un questionnement sur la récolte des flux de données plus importants, leur protection et leur traçabilité. Les organismes de protection des consommateurs, ou encore les experts en numérique et en technologies nouvelles, sont les premiers à surveiller ces évolutions. Un avis sur l’Internet des objets, a été adopté par les autorités européennes de protection des données en septembre 2014. Les individus sont à la recherche de sécurité. Le comportement méfiant des professionnels vis-à-vis des objets connectés existe et il peut s’intensifier, selon l’usage et la place qu’ils auront dans le cadre du travail. Il y a quelques années, ce sont les GPS et d’autres équipements de « tracking », destinés aux salariés terrains, qui ont été rejetés. Le mode de fonctionnement à été longtemps contesté avant d’être accepté.
Il sera très facile pour les entreprises de tomber dans le fléau « Big brother » (1984, George Orwell), si l’internet des objets est amené à se vulgariser. Plus que jamais surveillé et contrôlé, le salarié va devoir être en mesure de connaitre ses droits et les limites de l’usage de tels objets. Les entreprises, ont pour premier objectif, de réguler ces nouvelles modalités de travail afin d’assurer une bonne utilisation de ces techniques. Des outils performants vont devoir aussi être mis en place pour protéger les données.
Dans l’ouvrage d’Alexandre Des Isnards, L’open espace m’a tuer, on comprend que les nouveaux modes de travail aboutissent souvent à des désordres psychologiques et des déséquilibres au sein des équipes. Il est alors indispensable de communiquer auprès de l’interne, et d’assurer un accompagnement efficace pour favoriser l’acceptation de ce service. Le chemin sera long et semé d’embûches pour les entreprises. Néanmoins, avec persévérance, les freins d’adoption seront levés, pour laisser place aux réelles valeurs de ces objets intelligents.
Auteure : Fatima Farkhsi
***
Un article de notre dossier Marketing des objets connectés
Aller plus loin…
- Avis CNIL, 2014
- Etude GFK, 2015 :
- Etude Cisco, 2013 :
- La vie Liquide, Zygmunt Bauman, 2006
- 1984, George Orwell, 1950
- L’open space m’a tuer, Alexandre Des Isnards, 2008
(c) ill. Shutterstock – Target customer and human resources (HR) concept
frederique
12 février 2016 à 15:46
il ne faut pas passer sous silence aussi que ces technologies de l’information et de la communication (TIC) , devenues omniprésentes dans le monde professionnel , entrainent de profondes modifications des conditions de travail et d’organisation dans les entreprises.
Ces nouveaux outils présentent des risques pour le nombre grandissant d’employés et de cadres qui les utilisent intensivement : http://www.officiel-prevention.com/formation/fiches-metier/detail_dossier_CHSCT.php?rub=89&ssrub=206&dossid=483
Serge-Henri Saint-Michel
13 février 2016 à 16:15
@Frédérique. Certes. La chaise de bureau rotative aussi 😉