Le respect n’est pas simplement dû à nos aînés. En entreprise, parfois oublié, il est pourtant un facilitateur de la communication. Paradoxalement ?
La réunion de travail avait tout de convivial : un restaurant en ville, une salle en I, une vingtaine de convives.
Début de la séance avec 10 mn de retard, arrivée de trois collègues pendant les 8 premières minutes de l’intervention, salutations des retardataires aux ponctuels, déconcentration de l’assistance, maintien tant bien que mal du cap par le speaker, puis glissement vers des apartés bruyants entre convives, qui, par la suite, diront au conférencier que sa voix ne porte pas (ajoutons que la cambuse usinait à plein).
Le déjeuner « de travail » se termine. Certains invités s’en vont sans saluer leurs pairs et évitent l’intervenant (qu’ils étaient venus pour « écouter »).
Violence en réunion
Cet épisode est caractéristique d’un manque de respect, d’une forme de violence.
La violence ne peut être décorrélée de la relation à l’Autre car la communication procède du respect de l’Autre. Faire preuve de respect, c’est s’assurer de la qualité de communication avec l’Autre, lui permettre de déployer ses arguments dans un cadre propice.
Faire preuve de respect dans la communication en entreprise, c’est se mettre au même niveau que son interlocuteur, comprendre sa position, occuper temporairement sa place, créer des ponts et non ériger des murs de mauvaise foi.
Mais le respect est difficile à… respecter : profonde volonté, il doit être pensé, toujours présent à l’esprit, tant au bénéfice de la communication interpersonnelle, que pour celui du groupe.
Le manque de respect est donc un comportement individuel qui nuit à la collectivité et génère des pertes de communication : brouillages, énervements, distanciation, sur-justifications et sur-jeux, arguments fallacieux… et révèle la peur de l’engagement dans la communication (en plus de l’évidente mauvaise éducation) ainsi que la persévérance dans un comportement toxique pour le groupe.
Etre respectueux se travaille
Quelles sont les explications à un comportement individuel irrespectueux ?
Le respect envers l’Autre ne peut exister que si nous avons du respect envers nous-même. C’est pour nous la condition sine qua none. Celui qui ne se respecte pas ne peut pas respecter son prochain. Vu sous un angle communicationnel, respecter l’autre est se respecter soi en le considérant comme un égal, pour s’élever mutuellement (cf. l’expression « être bien élevé », qui, entre autres, invite à des relations respectueuses).
L’autre raison du manque de respect est le résultat de la façon dont nous nous percevons. Si nous n’avons pas confiance en nous, et que donc nous manquons fondamentalement d’une base solide qui ne nous aura pas été donnée par des parents suffisamment bons, pour citer Winnicott, nous souffrirons d’un grand déficit de confiance en nous, ce qui fera le nid d’un manque de respect envers les autres. Nous reproduirons tout simplement le schéma qui nous a vu grandir : mes parents m’ont maltraité donc ne m’ont pas respecté, je vais reproduire ce comportement. Les pervers narcissiques, les manipulateurs sont les cas les plus graves issus de ce manque de respect dès la naissance de l’individu.
Pour optimiser la communication, le travail sur soi permet enfin de ne pas avoir peur de l’Autre et de le considérer comme une opportunité de découverte, de cognition, même lorsqu’on ne partage pas ses thèses.
En somme, le respect ne peut naître que d’une réparation de l’individu comme par exemple un travail psychanalytique au cours duquel il apprendra à s’aimer et donc sera tout naturellement capable de respecter l’Autre car cet Autre sera un Autre lui-même et non plus un objet.
Et si le respect faisait partie du savoir-être au travail ? Et si le savoir-vivre faisait partie des critères de recrutement et des contraintes managériales ?
Et si la RSE qualifiait et concernait aussi le Respect et la Sollicitude en Entreprise ?
Auteurs : Valérie Sengler, psychanalyste, et Serge-Henri Saint-Michel, planneur stratégique
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