Quel ethnomarketing pour les marques globales ? Comment éviter le communautarisme et les marchés de niche ? Interview exclusive de Thomas Turcat, Directeur Général EthnoPub.
Comment s’explique l’assimilation entre le marketing ethnique, le marketing multiculturel et l’ethno-marketing ?
Ces distinctions sont surtout de la sémantique. Pour moi, l’ethno-marketing répond à une demande spécifique des français issus de l’immigration. Cette population a des besoins et des habitudes de consommation qui lui sont propres. Son pouvoir d’achat est de plus en plus important et il y a de plus en plus de services qui lui destinés.
C’est pour lui faire connaitre ces produits et services, que les professionnels de la communication usent de leur arsenal d’outils marketing pour s’adresser à cette population.
Quelle définition donnez-vous de l’ethnomarketing ?
L’ethno marketing est né aux États-Unis au début du vingtième siècle. Pour moi, il part du principe que pour mieux atteindre les consommateurs, les marques ne doivent pas seulement prendre en compte les critères traditionnels tels que la tranches d’âge et le revenu objectifs. Pour mieux capter la réalité des modes de vie et de consommation, l’approche ethnique peut être nécessaire.
Selon Bernard Cova, l’ethno marketing consiste à « segmenter le marché local ou international en s’appuyant sur l’homogénéité d’une souche ethnique d’un groupe de consommateurs ».
Mais de manière plus générale, la nécessité de s’adresser à une tranche spécifique de la population ne se limite pas à la seule appartenance ethnique. Dans la société actuelle, il existe de nombreuses sous-cultures prises en compte par la publicité et le marketing, telles que la population des seniors, ou des amateurs de surfs par exemple qui sont l’objet de produits et de services spécifiques.
Le marketing devient d’ailleurs de plus en plus performant et s’adresse à des groupes de plus en plus petits, ses messages deviennent de plus en plus ciblés. En d’autres termes, il adapte sa stratégie de communication à son audience.
A quelles conditions les marques « globales » peuvent-elles aussi adresser des communautés ethniques ?
Il n’y a pas pour moi de conditions pour pouvoir s’adresser à des communautés ethniques : celles-ci n’ont pas attendu l’existence de produits qui leur sont spécifiques pour consommer. Elles font partie de la population globale et en tant que telles font partie du public auquel s’adressent les marques globales depuis longtemps.
Cependant certaines marques globales ont compris que, même sans avoir de produits spécifiques, il était pertinent, afin de mieux couvrir l’ensemble des cibles marketing de la population française, de tenir compte de la cible ethnique en travaillant un message spécifique, ou même souvent seulement en adressant le message généraliste sur des médias ethniques.
Les marques « globales » doivent-elles se défier d’un basculement vers le communautarisme et d’autres dangers liés à ces pratiques ?
Le danger c’est de verser dans la caricature et le cliché et de réduire le consommateur à sa seule appartenance ethnique. Le message doit s’empêcher d’être simpliste et tenter de saisir les besoins dans leur complexité.
Comment les marques pratiquant l’ethnomarketing peuvent-elles s’extraire d’un marché de niche ?
Justement en prenant en compte que l’appartenance ethnique est l’une des composantes du consommateur mais pas la seule. D’ailleurs de nombreux produits dits de niche ainsi que certaines habitudes de consommation peuvent dans certains cas concerner d’autres populations, qui finissent par les adopter. C’est l’un des effets de la mondialisation.
Enfin, à multiplier les approches ethnomarketing, ne rend-on pas les marchés moins lisibles et propices à la surenchère ?
Il faut rester souple et non réducteur. Ce n’est qu’à ce prix qu’on peut satisfaire des demandes spécifiques certes, mais qui s’inscrivent dans une tendance plus globale.
Dossier stratégies et marques
Marques et territoires d’expression (et de chasse)
- Branding et sensorialité, Charlotte Cochaud, Chargée de communication, Expressens
- Le packaging à l’ère de la frugalité. Françoise Dassetto, Présidente de l’agence White Spirit
- Marketing ethnique, un atout pour les marques. Interview de Thomas Turcat, Directeur Général EthnoPub
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- Digital, la marque au bout des doigts. Cyril Gaillard, Fondateur de Bénéfik
- Nom d’une marque ! Rodolphe Grisey, Directeur Associé, Fondateur de Demoniak
- Influence du digital sur les marques : comment s’adresser au consommateur ? Interview de Yohan Stern, dirigeant et fondateur de La Fabrique à Jeux et à Buzz.
Marques digitales et stratégies de protection juridique
- Protection et stratégie de marque dans la société digitale. Perrine Pelletier, Pelletier Avocats
Les enjeux relatifs à la marque dans la société digitale sont aussi multiples qu’il existe de sources d’information et d’opportunités de visibilité sur le web, qui sont autant de risques de contrefaçon ou parasitisme. Le seul enregistrement de la marque ne suffit donc plus à assurer son monopole. - Stratégie de marque et nouvelles extensions Internet : 5 questions pour faire le point. Marie-Gwénaëlle Chuit, Juriste Propriété Intellectuelle
Marques et relations consommateurs
- Vendre du plaisir d’acheter : la marque. Eric Phélippeau, Président de By Agency Group
- Marques d’amour, marques de rupture. Sophie Gay, Directrice de Nomen France
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Relations marques / consommateurs : implications (1/ 2) ? Interview de Philippe Nobile, Senior Manager « Grande Consommation », cabinet Kurt Salmon. - Marques : feu les artifices ! François-Xavier Faucher, Président, Go2Prod
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