En complément du dossier thématique du mois, une analyse des présentations institutionnelles des Laboratoires pharmaceutiques nous éclairent sur le niveau d’exigence que se donnent les différents acteurs pour assoir leur image « corporate », lors de prises de paroles externes importantes (conférences, communication devant des analystes financiers ou des journalistes économiques…).
Les différences sont marquantes et force est de constater, qu’il ne s’agit pas encore pour la majorité des entreprises du TOP 15 mondial du secteur, de créer de la valeur autour de ces présentations.
Cette dimension de la communication globale de l’entreprise est pourtant un axe de différenciation important devant des publics exigeants.
1. Les présentations ne sont pas toujours connectées avec le schéma global de communication
La question de la cohérence est la première explorée à la lecture de ces « slides » ; s’intégrent-elles bien dans la charte graphique de l’entreprise, apporte-t-elle une valeur ajoutée dans la mise en forme, susceptible de transmettre efficacement les principaux messages déployés ? Trois groupes de laboratoires se distinguent :
. Les experts : cohérence et personnalisation : une adaptation rigoureuse et créative du territoire graphique au support Powerpoint (Bayer, Novartis, Sanofi-Aventis, GSK), qui nous fait dire « il s’agit bien de la même entreprise ».
Le lien de parenté existe entre la « home page » du site et la « page d’entrée » de l’Assemblée Générale 2008.
Les minimalistes : transmission d’information basique : une utilisation d’une version ancienne du logiciel et peu d’aisance sur son utilisation (Pfizer, Astrazeneca, Roche)
Si l’esprit est conservé, on ne peut pas dire que le Laboratoire enrichisse sa présentation, il adopte plutôt une position de neutralité, sans avancer visuellement de valeurs identitaires personnalisées.
. Les autres : la présentation devient un boulet : ces entreprises ne savent pas tirer partie de la modernité de l’outil (Merck, Abbott, Lilly, Johnson&Johnson, Boehringen Ingelheim).
Pour ces laboratoires, l’exercice de la présentation en réunion est déconnecté du reste de la communication et parfois, dans un style qui éloigne de la cohérence.
2. Les valeurs des entreprises ne sont pas toujours communiquées intelligiblement.
Plusieurs fois dans l’année, les laboratoires pharmaceutiques interviennent en présentation devant la communauté financière et scientifique, en abordant les faits marquants observés, en projetant leurs prévisions stratégiques et résultats financiers. Leurs valeurs s’articulent autour de la SANTE, la RECHERCHE, la TECHNOLOGIE et la dimension HUMAINE. Les axes retenus en présentation varient selon les entreprises :
1.Axe bien-être :
Le message institutionnel de Bayer et Novartis est fort, il est présenté avec une expression de modernité et d’innovation par Bayer, de sérénité et de confort par Novartis et Abbott
2.Axe scientifique
Une stratégie illustrée de deux manières, Sanofi-aventis apporte visuellement une dimension innovante qui correspond bien à sa réalité ; en revanche, si le laboratoire Amgen a choisi le même axe, il le communique avec beaucoup moins d’impact et de personnalisation.
3.Axe graphique : une expression neutre, mais professionnelle
GSK a pris résolument le parti pris de la modernité, avec cohérence et originalité. En droite ligne de son identité visuelle, elle exploite une forme élancée et dynamique ; Pfizer impose une image très rigoureuse.
4.Axe graphique : une expression neutre, mais peu symbolique
Le positionnement de Roche et Astrazeneca ne laisse à peu près rien transparaître des valeurs de l’entreprise à travers sa charte de présentation. L’excès de sobriété n’est pas toujours éclairant. On est en droit de se poser la question : mais qu’ont-ils voulu dire ?
3.La mise en forme du contenu manque souvent de consistance
Les présentations font entre 25 et 80 pages en fonction des évènements, il est par conséquent essentiel d’observer comment la déclinaison s’opère au fil de la présentation et si, en final, le public reçoit le message avec clarté et enthousiasme. Encore souvent, le visuel qui introduit la présentation est flatteur (c’est un masque imposé en interne), mais dès que les orateurs défilent les pages de contenus, alors ce qui est montré, n’est plus à la hauteur de ce qui est dit.
En conclusion :
les acteurs de ce secteur , dont les 15 premiers mondiaux ont un CA dépassant tous les 11 milliards USD ; ils évoluent sur des marchés très profitables, où la recherche représente un investissement essentiel de la stratégie, ce que leur communication ne dit pas souvent eu égard à cette analyse.
Les quatre premiers mondiaux jouent dans la même division, en préemptant des territoires assez maîtrisés. Parmi eux, les challengers se remarquent par leur capacité d’innovation (Sanofi-aventis, GSK), le leader ayant un positionnement plus classique. Bayer s’invite dans le TOP 5, en adoptant une charte graphique moderne et symbolique, qui assoit une certaine légitimité.
Les autres entreprises n’ont malheureusement pas fait de ces présentations des priorités dans leur schéma directeur de communication, laissant le public dubitatif quant à leur capacité à transmettre leurs messages avec force, cohérence et conviction.
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