Crise sanitaire oblige, le e-commerce a le vent en poupe. Par nécessité, les habitudes d’achats ont largement évolué ces dernières années, et cela ne concerne plus seulement le BtoC. La dernière étude réalisée par McKinsey [1] affirme ainsi qu’aux États-Unis les ventes BtoB sont désormais en majorité réalisées via le commerce électronique, une première dans le monde et une boule de cristal pour l’avenir du e-commerce BtoC en Europe et en France. Alors que les entreprises se préparent à une nouvelle année d’incertitude, une chose est sûre : les ventes B2B sont résolument omnicanales.
La confiance est un point clé dans le processus d’achat. Confortée par des expériences réussies en BtoC, 2021 fût l’année de la bascule pour les e commerce BtoB aux Etats-Unis avec 65% des ventes effectuées au travers de ce canal. En France, ayant habituellement une ou deux années de retard dans ce secteur, aujourd’hui “uniquement” 40% des acheteurs BtoB réalisent leur achat sur internet au moins une fois par semaine et environ 4 entreprises sur 10 réalisent 50% de leurs achats sur internet [2], et ces habitudes d’achats devraient encore augmenter.
Des opportunités à saisir
Cette prédiction implique alors de nombreuses opportunités à saisir pour certaines entreprises, mais également un grand risque pour d’autres. Alors que cette mutation des habitudes d’achats représente une occasion unique pour les gros distributeurs, qui possèdent la taille et le capital pour créer des compétences internes autour du digital, les plus petites entreprises sont menacées d’être happées par les marketplaces puis de disparaître. Comme cela est déjà le cas aujourd’hui : les petits acteurs du e-commerce ne font pas le poids face à des « Amazon siphonneurs ». Car lorsque l’on voit qu’Amazon est capable de développer son propre réseau de transport de marchandises pour contourner la tension sur la chaîne d’approvisionnement mondiale, il semble évident que les défis du digital ne sont que brindilles sur leur chemin.
Finalement, alors que les ventes BtoB en e-commerce augmentent chaque année, de moins en moins de petits acteurs du secteur semblent capables de suivre le rythme et de financer leur transformation digitale. Ce fossé creuse l’écart entre les grandes et les moyennes et petites entreprises, et éjectent du train du digital ceux ne pouvant se permettre d’y rester. Cette diminution révèle finalement la genèse d’un système oligopolistique auquel les plus petites entreprises ne pourront échapper.
Pourtant, l’évolution du e-commerce BtoB pourrait rebattre les cartes et faire émerger une redistribution du marché. En suivant les schémas classiques, l’omnicanalité croissante aurait comme conséquences évidemment de perturber le secteur d’activité mais surtout de dynamiser les nouveaux entrants qui ont pris en compte l’évolution des habitudes de consommation et ont construit leur projet en conséquence.
Cela peut être aussi une opportunité pour des industriels de court-circuiter les distributeurs en réorganisant leur force de vente vers le consommateur final, et finalement d’accroître leur marge.
Aux États-Unis la révolution est déjà en marche, d’ici quelques mois la France marchera dans ses pas et l’heure est aux pronostics : les géants vont-ils devenir encore plus grands ?
Auteur : Jean-Paul Crenn, fondateur de VUCA Strategy
[1] https://www.mckinsey.com/business-functions/marketing-and-sales/our-insights/b2b-sales-omnichannel-everywhere-every-time
[2] Étude réalisée par VUCA Strategy en 2021.
(c) Ill. DepositPhotos