Tandis que les instituts de sondage sondent le cœur, le cerveau et le porte-monnaie des consommateurs, afin que les industriels des produits de grande consommation puissent définir au mieux leurs produits pour les consommateurs qu’ils ciblent, qui s’intéresse à sonder et à mieux comprendre les clients BtoB ?
Le client BtoB apparaît comme une sorte de boîte noire car nous sommes face à une dichotomie : d’un côté une personne morale, une marque intangible et « corporate », et d’un autre côté, ceux qui représentent et personnifient cette marque, mais qui occupent des fonctions très variées.
Si le client est une PME, le dirigeant sera sans doute l’interlocuteur privilégié…
Si le client est un grand groupe, l’interlocuteur privilégié sera alors plus probablement un responsable du service achats …
Il existe néanmoins une pluralité d’interlocuteurs potentiels et c’est souvent la nature même ou la complexité du produit acheté, qui détermine le niveau et la fonction de l’interlocuteur qui va donner figure humaine à ce client BtoB.
Comprendre la valeur perçue par le client
Donc, règle n°1, pour mieux connaître ses clients BtoB, il faut d’abord comprendre la valeur que représentent son produit et/ou ses services pour ce client.
Si vous commercialisez des applications qui, adaptées sur une tablette, permettront à l’équipe commerciale d’améliorer sa productivité, votre client sera le directeur commercial, c’est lui qui pilotera votre relation au sein de l’entreprise, qui vous mettra en relation avec le service informatique, qui interviendra auprès des achats pour élaborer une négociation basée sur le coût d’utilisation, plutôt que de vous enfermer dans un bras de fer transactionnel…


Sylvie Lacoste, enseignant-chercheur à l’EMLV (Ecole de Management Léonard de Vinci) en marketing BtoB/ commercial et gestion des grands comptes
Si vous vendez des fournitures de bureau, vous ne rencontrerez peut-être jamais votre client, qui s’avérera être une assistante assise derrière son ordinateur et son logiciel d’e-procurement…
Savoir si son produit/service représente une valeur stratégique ou n’apparaît que comme une « commodité » pour son client, permettra de mieux connaître son client au sens de mieux cibler l’interlocuteur qui agira comme son représentant.
Cette première étape, en cache une autre. Ce premier niveau d’interlocuteur n’est souvent qu’un maillon dans une chaîne de prise de décision souvent plus complexe qu’elle n’en a l’air : qui informe, qui décide, qui influence, qui utilise le produit ou le service ? Quels sont les niveaux de pouvoir de chacun des niveaux de la chaîne ?
Comprendre les enjeux cachés
Donc, règle n°2, pour mieux connaître ses clients BtoB, le commercial doit à la fois se transformer en Sherlock Holmes, en confident, en consultant, en négociateur, en entremetteur, bref, patiemment démêler l’écheveau des relations humaines et professionnelles au sein de l’entreprise cliente, jusqu’à trouver le « Saint Graal », qui décide quoi et sur quel critère…
Attention aux habitudes et au conformisme relationnel qui réserve parfois de mauvaises surprises – tel cet acheteur, qui a attendu patiemment pendant plusieurs années que le fournisseur attitré de services marketing, finisse par trouver le chemin de son bureau, après que le seul interlocuteur en charge du marketing, que ce fournisseur côtoyait, ait démissionné. Alors, cet acheteur, dans un acte de vengeance attendu depuis si longtemps, lui a signifié qu’il le sortait du panel fournisseurs… Il aurait juste suffi de l’impliquer de temps en temps dans les discussions…
Ou ces caristes, qui à la livraison de la première palette de produits d’un nouveau fournisseur, les renvoyèrent illico avec la mention « non conforme », car personne au sein de l’entreprise fournisseur n’avait pensé à venir les rencontrer pour leur expliquer que le mode de palettisation était légèrement différent du fournisseur précédent…
Bref, connaître ses clients BtoB, c’est ouvrir la « boîte noire » et comprendre tous les enjeux cachés et les jeux de pouvoir de cette organisation.
Aujourd’hui, l’utilisation des réseaux sociaux, particulièrement LinkedIn ou Viadeo, peut aider à bâtir et comprendre le sociogramme des relations et de l’organisation interne de ses clients.
Malheureusement, chaque organisation est en mouvance et ce travail de compréhension de l’organisation cliente est incessant et doit s’accompagner d’une compréhension des besoins et des problèmes rencontrés par ce client pour anticiper et proposer les solutions adéquates.
Ce niveau de connaissance est le plus complexe à acquérir et maintenir – sauf à s’intéresser aux clients de ses clients.
Connaître les propres clients de ses clients
Enfin, pour mieux connaître ses clients BtoB, il faut chercher à connaître les propres clients de ses clients…
On peut faire soi-même des études de marché ou acheter de telles études pour suivre l’évolution des marchés des clients de ses clients et adapter ses fournitures à cette évolution.
Un grand distributeur d’équipements électriques a fait réaliser de telles études, qui lui ont permis de proposer à ses clients directs, une clientèle d’artisans, des formations pour apprendre à vendre et à installer des produits plus écologiques (proposés par ce distributeur) et qui correspondaient à l’orientation de la demande par leurs clients finaux. Dans ce cas spécifique, le distributeur a fait le lien entre ses clients BtoB et leurs clients BtoC – c’est la connaissance des besoins émergents des clients finaux, qui lui ont permis au-delà de la connaissance de ses propres clients artisans, de les fidéliser…
Bref, aujourd’hui, le succès commercial passe non plus par la simple connaissance de ses clients BtoB, mais, par celle de ses clients BtoBtoC…
Auteure : Sylvie Lacoste, enseignant-chercheur à l’EMLV (Ecole de Management Léonard de Vinci) en marketing BtoB/ commercial et gestion des grands comptes
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Un article de notre dossier Marketing B to B

