Droit et pratiques marketing

Retrait de la publicité en ligne d’Heineken

Publicité et alcool : retrait de la publicité en ligne d’Heineken. L’Association nationale de prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA) a obtenu en référé auprès du Tribunal de Grande Instance de Paris (ordonnance du 18 juillet 2013), le retrait des publicités en ligne autour de la bouteille Heineken édition spéciale « Ed BANGER », réalisée à l’occasion des 140 ans de la marque. Rappel des faits…

Publicité et alcool : retrait de la publicité en ligne d’Heineken.
L’Association nationale de prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA) a obtenu en référé auprès du Tribunal de Grande Instance de Paris (ordonnance du 18 juillet 2013), le retrait des publicités en ligne autour de la bouteille Heineken édition spéciale « Ed BANGER », réalisée à l’occasion des 140 ans de la marque. Rappel des faits…

Pour ses 140 ans, la célèbre marque d’alcool, Heineken, s’est offert les services du designer Ed Banger pour réaliser une bouteille édition limitée. Cette dernière avait la particularité d’être fluorescente et de comporter un texte en anglais dont la traduction est la suivante : « Permettez-moi tout d’abord de me présenter, je suis la bouteille Heineken édition limitée. Aussi, comme vous allez inévitablement mettre vos lèvres sur mon cou, j’ai imaginé l’étiquette adéquate. Je voulais créer une bouteille et un décor très spéciaux pour cette occasion. En effet, 2013 est une année anniversaire commun de Heineken et Ed Banger, 140 ans et 10 ans. Mets-moi à la lumière puis éteins la lumière. Surprise. Je suis illuminée. C’est une première. C’est lumineux » ; le tout dans des graphismes assez irréguliers et qui n’étaient pas immédiatement lisibles avec la plus grande clarté.

L’ANPAA a engagé une procédure de référé pour solliciter le retrait de toute publicité en faveur de cette bouteille sur tous supports, en tous lieux et notamment sur les sites de ventes en ligne et les applications Facebook qui avaient été mis en place.

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Par ordonnance du 18 juillet 2013, le Président du TGI de Paris constate que les mentions figurant sur la bouteille sont incitatives et n’ont aucun rapport avec les éléments de l’article L.3323-4 du Code de la santé publique et que le dialogue mis en scène n’a d’autre but que d’inciter à l’achat et à la consommation du produit, incitation qui constitue un trouble manifestement illicite.

Le juge constate cependant que la communication mise en place sur les sites de ventes en ligne et sur Facebook a été supprimée et estime qu’il n’y a par conséquent pas lieu à référé. Il alloue toutefois une somme de 5.000€ à titre de provision sur des dommages et intérêts au profit de l’ANPAA.

Eric Andrieu, avocat au cabinet Péchenard et Associé

Eric Andrieu, avocat au cabinet Péchenard et Associé

Pour ce qui concerne les mentions elles-mêmes, l’appréciation du juge n’est pas surprenante et l’on peut en effet estimer que des indications telles que « comme vous allez inévitablement mettre vos lèvres sur mon cou, j’ai imaginé l’étiquette adéquate », vont au-delà de ce que permet la loi Evin.

On pourrait d’ailleurs ajouter que, par nature, des indications en langue anglaise ne peuvent être suffisamment descriptives (ce qui avait été jugé dans une précédente affaire à propos de la signature Heineken « For a fresher world »).

Cette affaire posait cependant un certain nombre d’autres questions auxquelles la décision ne répond pas forcément.

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La possibilité de faire réaliser un conditionnement par un designer bénéficiant par ailleurs d’une certaine notoriété.

On peut relever que ce point en tant que tel n’était pas directement critiqué par l’ANPAA et que le juge ne le stigmatise pas.

La possibilité d’avoir recours à Facebook.

En effet, cette possibilité a été contestée par un certain nombre de décisions et notamment par un arrêt récent de la Cour de Cassation. Là encore, le juge ne prend pas position sur ce point mais ne critique pas cette démarche en elle-même.

La liberté pour une marque d’alcool de créer un conditionnement qui ne soit pas conforme à la loi Evin puisque, selon l’article L.3323-4 (rappelé dans l’ordonnance) « le conditionnement ne peut être reproduit que s’il est conforme aux dispositions précédentes », ce qui implique a contrario la liberté de création des conditionnements lorsqu’ils ne sont pas reproduits en publicité.

Sur ce point, il est possible de rappeler que l’ANPAA elle-même semble ne pas revenir sur ce principe puisqu’elle ne sollicitait pas l’interdiction de vente des produits mais uniquement l’interdiction de leur publicité.

Naturellement, le juge ne va pas au-delà de la demande de l’ANPAA.

Notons enfin que si la formulation des expressions figurant sur la bouteille pouvait être critiquée, le juge sanctionne le fait qu’elles n’avaient « d’autre but que d’inciter à l’achat et à la consommation du produit », ce qui constituerait le trouble manifestement illicite permettant l’intervention du juge des référés.

Une nouvelle fois, il convient de déplorer cette motivation puisque l’incitation à l’achat et à la consommation est l’objet même de la publicité et que tant que cette activité ne sera pas interdite, il ne devrait pas pouvoir lui être reproché d’être incitative.

Auteur : Eric Andrieu, avocat au cabinet Péchenard et Associés

2 commentaires

2 Comments

  1. Joseph

    24 août 2013 à 4:13

    Existe-il un conditionnement qui n’a pas pour but « d’inciter à l’achat et à la consommation du produit » ?

    • Serge-Henri Saint-Michel

      26 août 2013 à 15:27

      Bien entendu.
      C’est le packaging qui a cette fonction de communication.
      L’emballage, lui, peut n’avoir qu’un objectif de transport ou de conservation des produit, sans communication.

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