Pratiques et processus

Optimisez les performances de votre site web par l’ergonomie !

Suite à l’étude menée par Yuseo, agence d’études et de conseil en ergonomie des Interfaces, sur l’ergonomie des sites de cybermarchands et la performance des sites Internet, nous avons demandé à Jean-Pierre Le Borgne, directeur général de Yuseo, de resituer les « contraintes » ergonomiques avant de détailler les enseignements de cette étude.

A quelles difficultés méthodologiques la mesure de l’ergonomie d’un site est-elle confronté

1111 Citations de Stratégie, Marketing, Communication, par Serge-Henri Saint-Michel

La principale difficulté rencontrée par l’ergonomie des systèmes interactifs est le manque d’information des professionnels du marketing sur les apports et les méthodes de cette science. Ainsi, l’ergonomie des interfaces est souvent réduite au « bon sens », lorsqu’elle n’est pas confondue avec le graphisme. Or, le bon sens, tout le monde estime en avoir, pourtant, en conception, ce qui s’y apparente se caractérise souvent par des projections sources d’écueils sur les sites ! Tout le challenge de l’ergonomie des interfaces est donc d’accompagner les acteurs du marketing sans pour autant laisser de côté les fondements mêmes de cette discipline.

L’ergonomie couvre à la fois les aspects d’utilisabilité (dimension fonctionnelle) et d’utilité. Elle s’attache à observer et à analyser les comportements des utilisateurs en évitant surtout de se mettre à leur place. Dans ce cadre, la tentation fréquente est d’appliquer au web des méthodologies d’études marketing largement éprouvées sur des médias traditionnels. Cependant, sur Internet, l’utilisateur est avant tout actif ce qui rend ces techniques et celles basées sur le déclaratif insuffisantes voire inadaptées, pour appréhender la composante cognitive (traitement de l’information), comprendre et optimiser les comportements utilisateurs. En effet, l’ergonomie des interfaces implique la prise en compte de nombreux paramètres spécifiques reposant sur des normes de conception (ISO, AFNOR).

Sur ce terrain, différents courants sans fondement ergonomique éprouvé se sont succédés et sont largement repris : « avec 6 utilisateurs, 80 % des problèmes sont identifiés », « la règle des 3 clics »… Actuellement, l’eye-tracking, qui est une méthode ergonomique qui aura bientôt 30 ans (dont 15 ans sur les interfaces), est la plus médiatisée. Cependant, l’attrait visuel de ses livrables (cartes de chaleur) ne peut occulter les véritables limites opérationnelles largement admises quant à l’exploitation opérationnelle des résultats sur les interfaces. En effet, dans la mesure où sur une interface le fond et la forme sont très liés, les mécanismes entre comportement et perception visuelle sont loin d’être figés et modélisés : ce n’est pas parce qu’un élément a été fixé par l’internaute qu’il a été traité !

Pour apporter une réponse adaptée aux particularités d’Internet et lever les limites que présentent les méthodologies ergonomiques traditionnelles (faible échantillon n’autorisant pas de pondération) vis-à-vis des acteurs du marketing, dès 2003 Yuseo a développé des outils propriétaires d’analyse comportementale quantitative : Yuscard (architecture d’information et libellés) et Web Behave (optimisation du parcours clients). Ces derniers, couplés aux méthodes traditionnelles ergonomiques et confiés à une équipe d’ergonomes diplômés, permettent une analyse profonde, objective et argumentée pour optimiser et piloter l’expérience utilisateur online.

L’ergonomie consiste à « optimiser la performance de l’outil Internet dans sa dimension fonctionnelle ». Qu’entendez-vous par là ?

Si Internet est un média interactif qui joue un rôle central dans la stratégie de communication des entreprises, il reste avant tout un outil : un visiteur vient sur un site pour y faire quelque chose ! L’ergonomie des systèmes interactifs, vise à rendre les interfaces et donc la navigation la plus intuitive possible. Un site ergonomique permet à la majorité des visiteurs de se l’approprier simplement, afin de l’emmener naturellement et avec le moins de réflexion possible d’une intention à une réalisation.

Jean-Pierre Le Borgne, Yuseo

Jean-Pierre Le Borgne, directeur général de Yuseo : "l'ergonomie développe la performance des sites web"

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En ergonomie des interfaces, le plus souvent, une multitude d’éléments (petits ou gros) apparaissent tout au long de la navigation pour finalement devenir bloquants. Ainsi, le visiteur ne va pas trouver le produit, le service ou l’information recherché alors que ce dernier est disponible sur le site.

Lors de la première édition de l’Observatoire e-Performance, un journaliste nous a qualifié de « merchandiseur » du web ce qui illustre bien notre action et rôle aux cotés des directions Marketing. Le cœur de notre mission vise à nous assurer que l’organisation, la structuration et la présentation de l’offre soient en adéquation avec les besoins de la cible et les objectifs business du site.

Dans ce cadre, notre démarche sur l’aspect fonctionnel est assez simple :
• Mettre par exemple 400 personnes ciblées en situation de rechercher un produit phare ou une information clé sur un site,
• Le site performant doit permettre à une large majorité des personnes de réussir la tâche, afin de disposer d’un environnement fonctionnel propice pour gérer efficacement la diversité des visiteurs et des motifs de visite,
• Au-delà de 25 % d’utilisateurs n’arrivant pas à réaliser une tâche, le site présente un déficit de performance avec des obstacles à la navigation impactant directement l’efficacité des parcours client et potentiellement sa satisfaction.

Avec un environnement fonctionnel du site efficace, il devient possible de s’intéresser à l’usage et plus particulièrement à l’analyse de l’ensemble des comportements induits sur le site pour en maximiser l’impact positif au regard de la stratégie sur la base de métriques appropriées. .

D’ailleurs, votre étude 2008 sur les cybermarchés pointe du doigt « la création de liste ou conversion du panier en liste ». Vous ajoutez aussi que « l’utilisation de la liste pour le passage d’une commande pose de vrais problèmes ». Autres illustrations ?

Evaluation de parcours client

Evaluation de parcours client

Dans ce registre, l’Observatoire e-Performance permet d’apporter des illustrations concrètes sur la base d’échantillons représentatifs permettant la pondération. Les tâches proposées aux participants permettent d’évaluer des fonctionnalités basiques des sites marchands.

• Sur les Cybermarchés (1.000 personnes ont testé 5 sites), certains sites affichent moins de 50 % de réussite lorsqu’il s’agit d’enrichir un panier existant avec quelques produits spécifiques.
Sur le même sujet, en moyenne moins de 35 % des participants ont réussi à trouver les informations concernant la procédure à suivre en cas de réception d’un produit défectueux ou cassé. Autant dire que le levier de fidélisation par la réassurance est difficile à activer dans ce contexte.

• Sur les pure-players High-Tech (3.650 personnes en Angleterre, Allemagne et France sur 14 sites), la performance moyenne affichée pour trouver la meilleure offre tarifaire pour un console PS 3 et un jeu associé est inférieure à 50 % avec pour certains un résultat inférieur à 25 % !
Sur le même sujet, la procédure à suivre en cas de livraison d’un produit abimé, la moyenne n’est que de 45 % avec pour certains un résultat inférieur à 30 %.

Etude cybermarchés : « Un sentiment plutôt positif en début d’étude qui s’estompe en final avec un « nivellement » entre les acteurs en fin d’étude ». Cela signifie-t-il que de gros efforts ont été consacrés au design de l’interface… et moins au parcours client ? Est-ce aussi constatable pour les vendeurs de produits high tech ?

Depuis de longes années, les réseaux de distribution physique ont optimisé les parcours clients, la gestion de leur gamme et l’utilisation des promotions, en s’appuyant sur un process itératif fondé sur l’observation, afin de maximiser le chiffre d’affaires au m² de leurs points de ventes.

Parcours client

Parcours client

L’étroite imbrication du fond et de la forme sur internet a indéniablement donné une priorité au design « graphique » des interfaces, avec tout ce que cela comporte de subjectif et de volatil.

Pour sa part, le parcours client se construit dans la durée. Il repose sur des données fiables et argumentées de manière à capitaliser et rentrer dans une véritable boucle vertueuse de pilotage de la performance et de la définition de métriques appropriées (taux de conversion, panier moyen, lisibilité de l’offre..).

Pour l’Observatoire e-Performance du secteur High-Tech, tous les sites étudiés ont une notoriété et une visibilité établies avec des offres souvent très larges. Si globalement, ces sites ne présentent pas de défauts majeurs de conception au regard de leur maturité, la différence se fait sur un ensemble de petits éléments bloquants répartis sur l’ensemble du parcours client. Ce sont ces derniers qui génèrent des écarts de performances très significatifs entre les sites et impactent, in fine, la perception utilisateurs / client sur l’offre en termes de qualité, profondeur et capacité à répondre à ses besoins.

Quels sont, en matière d’ergonomie et à la lumière de vos deux dernières études, les points de vigilance pour le service marketing ?

Globalement, le canal web s’inscrit dans un référentiel marqué par le « court terme » (moins de 10 ans de recul) et de nombreuses évolutions techniques rapides. Si cette effervescence technologique est enthousiasmante, elle n’en est pas moins parfois précipitée. En effet, les équipes en charge du site manquent souvent de visibilité sur les forces et faiblesses de l’expérience réelle de navigation de leurs visiteurs au regard des objectifs fixés. Dès lors, il paraitrait légitime que sur Internet l’on s’attache à effectuer les mêmes démarches initiatiques que celles qui ont été faites pour le marketing traditionnel, notamment autour de la connaissance client et de la capitalisation sur ses comportements.

Ainsi, les données liées au trafic (nombre de visiteurs, origine, nombre de pages vues, durée de visite) ou le temps de réponse et à la disponibilité serveur sont intéressantes mais indiquent que « le magasin est ouvert et que les gens y viennent ». Les études déclaratives de satisfaction sont aujourd’hui considérées comme des indicateurs de symptômes/tendances mais ne permettent certainement pas d’en comprendre les causes : l’écart entre ce que la personne dit et ce qu’elle fait est admise depuis longtemps et est particulièrement crucial sur Internet ! Enfin, si les données de web analyse sont souvent très riches, elles s’avèrent aussi lourdes à exploiter et peu adaptées lorsqu’il s’agit de comprendre le comportement, c’est-à-dire la réalité des enchaînements des actions des visiteurs.

Dans cette logique et dans la droite ligne de notre discours lors de l’introduction des études comportementales quantitatives, le principal enjeu réside dans la capacité à prendre des décisions sur la base de données fiables, argumentées et objectives issues de la cible. L’observation des comportements des internautes permet de comprendre les particularités des parcours clients induits par le site Internet, de mieux comprendre le fonctionnement de cette « boîte noire » et donc les leviers d’optimisation de l’expérience client.

Les éléments purement fonctionnels sont-ils distinguables (dans l’étude) de ceux afférant au marketing ? Comment se passent les arbitrages chez le client après la remise d’une de vos études ? Que sacrifie-t-on ?

Non, sur Internet les éléments purement fonctionnels sont induits par ceux afférant au marketing. Une fois le périmètre défini par les équipes marketing (contenu, service, offre,…), l’ergonomie est à leur service pour en optimiser la délivrance au regard des spécificités du canal web. Le recueil et l’analyse des parcours clients permettent ainsi de s’assurer que l’offre et le service proposés soient délivrés efficacement avec l’identification des métriques nécessaires pour un pilotage qui s’inscrit dans la durée.

Dans cette perspective que Yuseo a travaillé sur une approche fine, au plus près de l’expérience utilisateur, afin d’apporter un éclairage fiable aux équipes marketing sur leurs actions en ligne. En effet, le mix des approches comportementales quantitatives et qualitatives, apporte une dimension statistiquement valide, argumentée, objectivée et illustrée. Pour optimiser son efficacité, l’intégration des recommandations implique souvent une démarche d’accompagnement, afin d’aider les équipes à gérer certains arbitrages et contraintes.

Enfin, les études d’ergonomie ne sont-elles pas mieux perçues (et attendues !) par les e-commerçants ou les distributeurs, plus au fait des contraintes de rentabilité (vs. les sites « d’image » / vitrine) ?

Les sites Internet font souvent l’objet de projections de la part des différents acteurs du projet. L’ergonomie intervient comme porte parole de l’utilisateur final en révélant certaines dérives entre ce que les internautes attendent du site et son existant. Aussi, au regard des enjeux de ROI liés au contexte actuel et face à la prise de conscience générale des priorités marketing centrées non plus sur la conquête mais sur la capitalisation / fidélisation client (cf. enquête Strategic Research septembre 2008), l’apport opérationnel de l’ergonomie est clairement attendu par les équipes.

En tout état de cause, la notion de parcours clients parle à tous les acteurs. Dans un magasin physique, l’optimisation du panier moyen est le fruit d’un travail sur l’ensemble de l’expérience client dès qu’il passe la porte jusqu’à son arrivée en caisse. Pour les e-commerçants, le juge de paix qu’est le chiffre d’affaires et/ou le taux de conversion permet en théorie de matérialiser directement les attentes en termes d’impact des actions correctives mais se révèle aussi un vrai raccourci. En effet, pour réellement maîtriser les leviers d’optimisation business, l’enjeu est de pouvoir « segmenter » les différentes étapes de l’expérience de l’internaute du début à la fin de sa visite.

Intreviewé : Jean-Ierre Le Borgne, directeur général de Yuseo

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