Facebook, avec ses modifications incessantes des règles du jeu, se montre de plus en plus un média social instable pour établir une relation marque / consommateurs pérenne. La cacophonie des règles, de l’edge rank sans cesse évolutif, d’une communauté moins touchée par les publications des marques, pose question. Cependant, sans revenir sur des évidences, Facebook et les autres médias sociaux ont conséquemment fait évoluer la relation que les marques (celles qui ont compris comment agir sur ce média) entretiennent avec les communautés de consommateurs.
Dans ce contexte, l’engagement des marques s’avère essentiel sur Facebook sans que pour autant leur présence y soit impérative. On parle depuis quelques années d’une nouvelle forme de relation client, d’un nouvel outil de CRM, d’un vecteur porteur (ou pas) de communication… Mais quid de ces marques qui persistent à ne voir en Facebook qu’un outil marketing permettant (croient-elles) de faire péter les scores de vente ? On en est loin. Très loin. Et ce n’est surtout pas le but premier de la présence marque sur ce média social.
Le consommateur se connecte aujourd’hui toujours plus, sans pour autant qu’il faille oublier qu’il continue majoritairement à faire ses courses le samedi après-midi en GMS. Facebook et sa mobilité, cependant, lui apporte informations et services. La proximité nécessaire d’une marque engagée réellement avec ses consommateurs permet de générer une grande proximité entre ces deux acteurs n’ayant plus confiance l’un en l’autre. On fera davantage confiance à un internaute qu’à une marque. Mais les marques poursuivent cette reconquête d’un relationnel construit, réciproque, loyal.
Toutes n’y parviennent pas.
L’image comme vecteur de confiance
Les points de contacts marque / consommateurs n’ont jamais été aussi nombreux. Les cibles se conquièrent, se multiplient, et les messages à l’envi tentent de transposer les valeurs de la marque et d’instaurer une véritable relation. Le Brand Content est et restera le nerf de la guerre actuellement à l’œuvre sur les médias sociaux.
On clique sur « J’aime » sur Facebook : la terminologie n’est pas anodine et instille une réelle relation affective avec nos marques, celles que l’on découvre, celles que l’on suit simplement pour ce qu’elles véhiculent, sans pour autant les consommer, ou celles avec lesquelles on entretient une relation fondée et longue, les marques de notre enfance, par exemple.
Et ces marques se doivent à nous. Nous créons, avec elles, un nouveau paradigme de communication : les marques ne s’appartiennent plus. Elles sont à la disposition des consommateurs, des fans, des followers. Elles sont à nous. Nous les supportons, désirons, encensons, détruisons, parfois. Nous ne sommes plus des spectateurs de leur communication, mais nous en sommes une partie intégrante et active, très active, même.
La confiance générée par un contenu qualitatif, par un message authentique, loyal, honnête, par des vrais fans et non des fans et des followers achetés, permet de fidéliser la communauté, de voir une image s’améliorer, de créer un lien fort avec les membres de la communauté posés en ambassadeurs, en acteurs réels de la communication de la marque.
Ce sont là des conditions sine qua non. Faute de quoi la marque ne saisit pas bien ce que serait l’équation du risque : manque d’honnêteté + contenus uniquement promotionnels + réaction des consommateur (la fameuse inconnue incontrôlable) = crise potentielle. La e-réputation d’une marque est à ce prix.
Communication en temps réel
Si de nombreux précurseurs au début des années 2000 proposaient déjà des sites communautaires, Dell, notamment, avec Direct 2 Dell, Facebook et le social média en général ont accéléré un mouvement que les marques ont eu du mal à suivre : s’adapter à des communautés allant toujours plus vite, en voulant toujours plus, le plus rapidement possible. Et les marques de devoir communiquer à flux tendu, en temps réel, en ne sachant pas ce qui peut leur arriver, si tant est que les stratégies de communication et de contenus n’étaient, ne sont pas posées.
On discute aujourd’hui d’égal à égal. L’échange est personnel avec nos marques. Aux Community Managers, non stagiaires le cas échéant, d’être bien formés, d’avoir parfaitement intégré la marque, ses valeurs, son patrimoine. La relation à la marque est aujourd’hui ternaire : Client, CM, Marque. Facebook n’est qu’un support d’expression. Rien de plus. Dans cette relation à trois, chacun doit rester sur ses positions tout en les faisant évoluer en temps réel, sur ses gardes, tout en sachant que la communication verticale de la marque vers les consommateurs a vécu au profit d’une communication horizontale.
Impliquer sans être intrusif
Connaître plus parfaitement les besoins, les motivations, les attentes, des clients, des consommateurs, des cibles, permet bien évidemment de mieux adapter les messages, d’impliquer plus aisément la communauté, ses ambassadeurs, ses membres influents. A condition, une fois encore, de proposer un contenu qualitatif, original, pertinent et créatif.
Une série de questions à laquelle toute marque devrait pouvoir répondre : qu’est-ce que je vais apporter à ma communauté ? Quel sera mon message ? Que vais-je leur dire, à quel moment et comment ?
Mobile, le consommateur n’a pas toujours besoin d’entendre le même message tout le temps. Il a besoin d’une information à un instant T, en fonction du lieu où il se trouve. Exigeant, il ne veut en aucun cas qu’on lui force la main. Acteur, il ne veut pas qu’on le prenne pour une vache à lait. L’imaginaire social média du consommateur doit être sollicité, titillé.
Mais tout en même temps, dans une valse langoureuse d’hésitations oscillant vers l’amour vache, nous jugeons, à juste titre, parfois, ces marques comme intrusives. Je veux bien t’aimer, je veux bien te soutenir, mais évite de fouiller sans discernement mon intimité, ma vie… Je ne suis pas ton ami, mais permets-moi de le devenir si tu te montres pertinente avec moi, chère marque.
Satisfais mes désirs, renforce mes sentiments, mes besoins d’appartenance, alimente ma TimeLine et je te répondrais. Force-moi la main, et je divorce. Mais au final, es-tu réellement mon amie ?
N’achètes-tu pas mon amour avec ta pub sur Facebook ? Avec tes post sponsorisés ? Avec tes contenus toujours plus poussés à grands coups d’Euros dans notre relation d’intimité ? Notre relation est-elle vraiment naturelle, au final ?
Tes artifices, ton maquillage, ton bel aspect, ne cachent pas, le plus souvent, ton but : tu me veux, tu veux que je te consomme… Mais est-ce que je te désire vraiment quand tu rentres sans prévenir dans mes data, dans ma vie ? Oui, je t’ai volontairement aimé, j’ai cliqué sur ton bouton. Mais que m’offres-tu en retour de mon amour ?
Sois gratifiante, sois drôle, surprends-moi. Je continuerai à t’aimer… Mais prends garde à toi. Je connais tes yeux de Chimène. Je sais que le colporteur Nescafé passant chez moi pour partager un instant social vient aussi dans ton intérêt, je ne suis pas aveugle. Est-on Really Friends dans ces conditions ?
Payer pour être aimé
Si les marques ont toujours été capables d’atteindre leurs cibles, elles risquent de devoir toujours plus payer. Isabelle Mathieu l’évoque dans un de ses articles, de l’aveu même de Facebook, et ce alors même que le consommateur est au cœur de sa marque, avec la personnalisation de ses produits : Nutella, Coca-Cola, etc. Dans cette valse d’ambigüités, dans cette multiplicité de publications postées jour après jour, émerger devient toujours plus difficile. Être vu est essentiel, mais comment l’être ? Comment fidéliser ? Comment maintenir ce lien construit avec les communautés ?
Toujours plus de pages marque likées, toujours plus de messages publiés… Mais la visibilité devient toujours plus onéreuse pour les marques, qu’il s’agisse de pousser l’audience de la page ou des posts… Faute de quoi, la livraison du message aux cibles ne sera plus possible et la rudesse concurrentielle pourrait pénaliser les marques ne jouant pas le jeu de Facebook et la nécessité du média social de faire rentrer des revenus publicitaires pour devenir un peu plus rentable.
Enfin, au-delà du modèle monétisé, les marques sur Facebook, notamment auprès des jeunes publics, doivent permettre une réelle appropriation des univers créatifs, des messages, de la relation, sans la moindre distanciation, sans se montrer trop intrusive, faute de quoi, l’amitié ne tiendra pas, et la crédibilité se perdra.
A chaque marque, la connaissance des modèles de stratégie pesés, les enjeux économiques mesurés, de savoir quelle est la pertinence de sa présence et la tonalité de son engagement auprès de ses communautés.
Auteur : Stéphane Favereaux, Digital Strategist, rédacteur, Brand Content Manager, formateur en communication. Chronique Radio Le Comptoir Digital. Blogueur sur Comm’Des’Mots
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Un article de notre dossier Facebook & Marketing
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