L’industrie pharmaceutique connaît depuis quelques années une véritable crise identitaire. Remise en question à chaque nouveau scandale, elle peine à rassurer sur son dessein premier : assurer le « bien-être » de ses patients.
L’affaire Mediator, la campagne de vaccination contre la grippe H1N1… Il est désormais difficile d’échapper aux problèmes que connaît l’industrie pharmaceutique. Les laboratoires sont évidemment les premiers touchés mais, avec eux, les politiques et les administrations. Considéré comme « la machine du diable », ce secteur est face à un véritable tournant : profit ou santé, il va falloir choisir.
Des médias intransigeants
A l’origine de l’ampleur de cette crise se trouvent évidemment les médias. Avec l’avènement de l’Internet et l’installation de la culture de l’information instantanée, il devient difficile pour les entreprises pharmaceutiques de cacher leurs « secrets ».
Auparavant, lorsqu’un scandale survenait, il était simple d’étouffer l’affaire et de diffuser une information contraire pour masquer les soupçons sur l’entreprise. Avec la montée en puissance des médias participatifs, chacun devient acteur du monde médiatique à part entière. Et faire entendre sa voix devient facile, en temps réel. Un danger pour les laboratoires pharmaceutiques qui se voient ainsi mis en cause aux yeux de tous.
Ce fut notamment le cas avec l’affaire Mediator : le buzz créé par le livre écrit par Irène Frachon a rapidement entraîné le laboratoire Servier dans les méandres de l’enfer. Attaqué de toutes parts, Jacques Servier a eu beaucoup de mal à prouver sa bonne foi et son désir de protéger les malades.
Ce jeu malsain entre profit et santé se ressent également dans les ordonnances quotidiennes des Français. Pratiquant intensivement le lobbying, les laboratoires pharmaceutiques n’hésitent pas à mettre la pression sur les médecins pour les inciter à prescrire leurs médicaments au détriment des génériques, moins coûteux. Des liaisons dangereuses mises à mal par les médias, qui consacrent des dossiers entiers à ces pratiques.
Affaiblie par de nombreux scandales, l’industrie pharmaceutique se trouve donc confrontée à un déficit d’image.
Une communication défaillante
Et cette image, il faut l’admettre, lui reste collée à la peau. Un employé de l’agence Ogilvy Healthcare, à Düsseldorf, estime ainsi que 72 à 80% des articles traitant des thèmes médicaux sont à attribuer à une action de relation publique ciblée. On pourrait donc s’attendre à une certaine maîtrise des médias. Il n’en est pourtant rien, au vu des derniers scandales. Consacrant de 12 à 30% de son chiffre d’affaires à la communication, l’industrie pharmaceutique peine encore à redorer son blason. L’affaire Mediator en fut le triste exemple : Jacques Servier, pour éviter le scandale, choisit la voie du silence. Une stratégie qui n’a malheureusement pas porté ses fruits, puisque le scandale s’est intensifié. De plus, ce silence s’est apparenté à un désintérêt pour les malades et la société est vite apparue comme déshumanisée.
Le cas de la grippe H1N1 est inverse. Roselyne Bachelot, à l’époque Ministre de la Santé et des Sports, fidèle au proverbe « mieux vaut prévenir que guérir », a mis en place une stratégie de communication intensifiée, pour inciter les citoyens à la vaccination utilisant pour cela intensivement les médias qui ne parlaient alors que des dangers de la pandémie et des gestes de prévention à adopter. Une campagne qui s’avérera au final plutôt inutile et coûteuse pour les citoyens français, qui sont aujourd’hui plus méfiants que jamais. Mais une campagne pas inutile pour tout le monde, puisque les laboratoires pharmaceutiques en profitèrent largement, écornant au passage un peu plus leur réputation. Ils ont néanmoins dû fêter comme il se doit cette aubaine. Alors comme on dit à l’occasion : santé !
Auteur : Cindy Bonnefous
Jérôme
12 juillet 2011 à 11:21
Quand les dirigeants auront compris que mépriser le public n’apporte pas grand chose en terme d’image de marque, un grand pas sera fait.
Ils oublient un peu vite que c’est eux qui achètent leurs produits.
J’espère qu’avec l’affaire mediator, les clients n’auront pas la mémoire courte.