La crise sanitaire n’aura été qu’un frein très temporaire pour l’industrie du luxe dont tous les indicateurs battent leurs niveaux d’avant-crise, notamment les investissements marketing. Ce dernier point a notamment permis aux entreprises de renforcer leur capital « émotionnel », de susciter plus d’engagement des consommateurs et de les inciter à revenir dans les magasins.
En analysant des facteurs clés tels que la dynamique des marchés, la concurrence, le nouvel équilibre des canaux de distribution ou encore la puissance d’une marque, les entreprises du secteur peuvent identifier les leviers d’action pour améliorer leurs performances et ROI. Tour d’horizon.
Mettre en place une stratégie et une mesure client-centric
Les nouvelles générations de consommateurs de produits de luxe vont fortement modifier l’industrie. D’ici 2025 les générations Y et Z seront les principaux acheteurs et représenteront plus de deux tiers des achats mondiaux. Friands d’expérience plus personnalisée, ils obligeront les marques à passer d’un modèle centré sur le produit à un plus orienté sur l’expérience client.
A cela s’ajoute la montée en puissance des influenceurs afin justement de mieux engager cette cible plus jeune. Différentes études démontrent d’ailleurs que ces influenceurs sont plus efficaces que les célébrités, mais moins efficaces que les RP traditionnelles. Le marché asiatique fait exception. Toutefois, avant de s’engager dans le marketing d’influence, les acteurs du luxe doivent fixer des indicateurs de performance clairs pour éviter de nuire à leur image. Etant donné la durée relativement courte de l’influence, une marque doit gérer son portefeuille d’influenceurs comme un gestionnaire d’actifs gère son portefeuille financier. Rien de moins !
Miser sur l’omnicanal et penser global
Si l’Europe et les Etats-Unis régnaient autrefois en maîtres, l’Asie est désormais la première région pour le secteur du luxe. Elle devrait atteindre 25% des ventes mondiales de produits personnels de luxe d’ici 2025. En 2020, au cœur de la crise sanitaire, elle enregistrait même 35% des ventes mondiales.
L’émergence d’une classe moyenne désirant acquérir des produits de luxe et l’essor de l’e-commerce expliquent cette tendance. On s’attend d’ailleurs à une forte augmentation des achats locaux sur le marché chinois par rapport à ceux effectués par les touristes. En effet, les différents confinements mondiaux et fermetures de frontières ont obligé les entreprises à renforcer leur présence locale. Chanel et Dior vendent désormais des produits exclusifs dans leurs magasins afin de recueillir des retours immédiats sur leurs nouveaux produits et ainsi s’adapter rapidement aux besoins des clients.
A cela s’ajoute l’émergence de l’e-commerce. Canal pas toujours jugé prioritaire, la pandémie a obligé les grands noms du luxe à se digitaliser plus vite que prévu. D’ici 2025, la part des canaux de vente en ligne pour le secteur du luxe devrait dépasser 30%. Désormais le digital a rejoint la télévision et la publicité extérieure comme principal point de contact du parcours client. Preuve que les marques ont saisi l’urgence, en novembre 2020, Alibaba et Richemont (propriétaire de Cartier) ont investi 1,1 milliard dans la place de marché chinoise de Farfetch – plateforme de mode haut de gamme. Une nécessité si elles veulent répondre à l’émergence de nouvelles marques de luxe digital native comme Parachute, Shinola ou encore Away.
Néanmoins, si les acheteurs de luxe s’attendent à une qualité de service élevée dans les magasins, ils la désirent également en ligne. Aux marques donc de transcrire cette expérience via leurs différents canaux digitaux.
Avoir des objectifs clairs
Le parcours client devient de plus en plus riche, les points de contact client se multiplient (Instagram, WeChat, WhatsApp…). Pour les marques cela implique de veiller au message qu’elles veulent transmettre sur ces plateformes, d’autant plus que le ciblage comportemental deviendra difficile pour les spécialistes du marketing avec la fin des cookies. Elles devront donc envisager de nouvelles manières de cibler, diffuser leurs publicités et de mieux engager leurs consommateurs.
De plus, face à des acheteurs plus engagés, la responsabilité sociale et sociétale de ces marques est questionnée, scrutée. La RSE sera une exigence essentielle et les valeurs telles que l’inclusion, l’égalité ou le respect de l’environnement devront transparaître dans l’image véhiculée par ces entreprises ou encore dans le choix des produits utilisés ou les processus de fabrication.
La transformation digitale du secteur du luxe, longtemps repoussée, est maintenant leur cible stratégique prioritaire. Le Covid-19 a accéléré un processus inévitable pour l’industrie qui devra satisfaire des consommateurs encore plus exigeants. Heureusement, le marché se réinvente et propose une expérience client en ligne reprenant les codes du luxe, en matière de personnalisation et de contenu. Cela est notamment possible grâce aux données collectées et analysées afin d’identifier les besoins, et proposer des services inédits (essais virtuels, ventes privées…).
Auteure : Virginie Lannevère, Directrice Senior, Analytic Partners France
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