« Au village global sans prétention j’ai mauvaise e-réputation » aurait pu chanter un avatar de Georges Brassens dans Second Life.
La e-reputation est devenue le centre névralgique de toute bonne stratégie marketing. Les forums de discussions, les blogs, Facebook, Twitter, Wikipedia, les commentaires sont des zones d’influence majeure que les entreprises tentent tant bien que mal de maîtriser pour dans le meilleur des cas valoriser leur propre image ou dans le pire dévaloriser celle du concurrent. Faire sa propre promotion via ces zones d’influence virtuelles est par principe licite.
Cette pratique peut toutefois en théorie se heurter à certaines obligations découlant de la loi ou bien des conditions générales des sites web 2.0 en question.
A titre d’exemple, l’article L.121-1 11° du code de la consommation dispose qu’est réputé trompeur et donc illicite le fait d’utiliser un contenu rédactionnel dans les médias pour faire la promotion d’un produit ou d’un service alors que le professionnel a financé celle-ci lui-même, sans l’indiquer clairement dans le contenu ou à l’aide d’images ou de sons clairement identifiables par le consommateur. Ce texte a pour domaine d’application principal la presse et les publi-communiqués ou publi-rédactionnels.
Malgré tout, la rédaction de ce texte pourrait suffisamment large pour permettre de s’appliquer par exemple à un annonceur commandant directement ou par le biais d’une agence un texte promotionnel à un bloggeur, texte qui ne serait pas explicitement mentionné comme étant publicitaire.
Les conditions générales d’utilisation de Facebook édicte en autre dogme que :
- « Vous n’enverrez pas et ne publierez pas de communications commerciales sans autorisation (comme des messages indésirables) sur Facebook
- Vous n’utiliserez pas votre profil personnel à des fins commerciales (comme en vendant vos mises à jour de statut à un annonceur, par exemple) ».
Facebook affiche ici clairement sa volonté d’éviter que les annonceurs puissent développer une politique publicitaire via leur plate-forme sans passer par leur propre système de publicité payant. Ce type de pratiques publicitaires est d’ailleurs étudié de près en France par le Centre de Surveillance du Commerce Electronique (CSCE), rattaché à la DGCCRF, à la suite d’une mission d’étude que lui a confiée le secrétaire d’Etat en charge de la consommation en janvier dernier. Cette mission vise essentiellement à traquer les faux avis de consommateurs ou encore les billets sponsorisés dans les blogs et non annoncés comme tels.
Pratiques anticoncurrentielles et e-réputation
Certains annonceurs vont plus loin en utilisant les réseaux sociaux comme vecteur de dénigrement de leurs concurrents. Deux décisions récentes ont pu mettre en exergue ces pratiques anticoncurrentielles.
La première affaire a été jugée par le tribunal de Montpellier (jugement du 17 janvier 2011), elle opposait deux concurrents : la société AK d’une part et Le Partenaire Européen d’autre part. Le Partenaire Européen avait constaté sur plusieurs forums de discussion des messages dénigrants. Par le biais d’une requête elle a obtenu les coordonnées des titulaires des adresses IP des internautes ayant laissé les messages litigieux dont la plupart émanait du gérant de la société AK. Pris la main dans le sac, le tribunal n’en à pas moins adopté une position très surprenante en refusant la moindre indemnité à Le Partenaire Européen arguant du fait qu’elle ne justifiait pas d’une perte de clientèle et que son image avait déjà été écorné par certains articles de presse.
Il est vrai qu’en matière de dénigrement il est très difficile voire impossible de démontrer l’existence de conséquences économiques à l’atteinte à l’image d’une société.
Dans une autre affaire (du 1er juillet 2011), le tribunal de commerce de Paris a d’ailleurs fait le exactement le même constat quant à la démonstration du préjudice mais à malgré tout décider d’octroyer la somme de 25.000 euros à titre indemnitaire (l’on est proche ici d’un préjudice sanction). Il s’agissait d’une affaire opposant Rentabiliweb et Hi-Media deux sociétés concurrentes ayant commis l’une à l’égard de l’autre divers actes de concurrence déloyale. Hi-Media avait trouvé opportun de supprimer la référence à son concurrent dans une fiche Wikipedia consacré au micro-paiement. Or, il a été établi que l’ordinateur à partir duquel avait été effectué ce retrait appartenait à Hi-Media, le tribunal a par conséquent considéré qu’il était démontré que le retrait avait été réalisé par une personne placé sous l’autorité de Hi-Media. Par ailleurs certains cadres de Hi-Media s’étaient répandus dans divers blog rappelant aux internautes que la société Rentabiliweb exploitait par ailleurs des sites pornographiques ou qu’elle était à l’origine d’une opération promotionnelle de distribution de billets de banque sur le Champ de Mars qui avait virée à l’émeute … Ces faits étant avérés, le tribunal a considéré que les commentaires en question ne constituaient pas des dénigrements. De son côté Rentabiliweb a été condamnée pour avoir diffusé de fausse information dans la presse sur l’une des filiale de Hi-Media, la société Allopass, et pour avoir par ailleurs réservé le nom « Allopass » via Google Adwords.
L’on voit bien que les annonceurs (et surtout leurs agences de communication) n’ont pas raté le train du Web social et mesurent avec acuité l’impact d’un tel outil, encore faut-il rester dans le cadre légal.
Auteur : Fabien Honorat, Avocat associé chez Péchenard et Associés
Benoit | Info-ecommerce
27 juillet 2011 à 14:13
Le E-reputation c’est aussi des agences ayant pignon sur rue qui vendent de faux avis clients pour les voyagistes et e-commerçants. je doute de la légalité de telles pratiques