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Mise en place de la Juridiction Unifiée des Brevets : nécessaire et difficile

Droit : la mise en place du brevet unitaire européen et de son pendant judiciaire (la JUB) sera la meilleure et la pire des choses... Quelles stratégies ?

Droit : la mise en place du brevet unitaire européen et de son pendant judiciaire (la JUB) sera la meilleure et la pire des choses… Quelles stratégies ?

Comme pour beaucoup d’innovations, la mise en place du brevet unitaire européen et de son pendant judiciaire (la JUB) sera la meilleure et la pire des choses.

La meilleure pour les déposants de brevets puisqu’elle permettra, à partir d’un seul dépôt, de disposer d’un brevet les protégeant dans 13 pays d’Europe au départ puis, au fur et à mesure de l’évolution, dans 26, 27 ou peut-être même les 28 pays de l’Union européenne, et ce en payant une seule taxe annuelle.

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Une fois le brevet délivré, une seule procédure devant la JUB permettra d’obtenir, si besoin, une décision provisoire, puis définitive, faisant cesser la contrefaçon commise par un seul contrefacteur dans plusieurs des pays membres de ce système. Les objectifs sont donc d’éviter, dans un même conflit, les contradictions entre les décisions pouvant être rendues dans différents pays, d’accélérer les choses en obtenant une décision au fond en une année maximum et de minimiser les coûts de conseils et d’avocats en évitant la multiplication des procédures.

Les titulaires de droits devraient donc être satisfaits de ce système, qu’ils ont demandé, et qui permettrait de protéger non seulement leur futur brevet unitaire européen, mais également leurs actuels brevets européens et, pour les sociétés du monde pharmaceutique, leur certificat complémentaire de protection.

La création du brevet unitaire européen et de la JUB peut être aussi la pire des choses pour certains défendeurs mais également pour les demandeurs.

Nouvelle procédure, nouvelle stratégie, nouveau risque

Richard Milchior, Avocat associé, Granrut Avocats

Richard Milchior, Avocat associé, Granrut Avocats

On a vu récemment ceux-là même qui souhaitaient la mise en place de ce nouveau système se battre pour pouvoir bénéficier gratuitement, pendant une période transitoire, de la possibilité de refuser que leurs actuels brevets européens relèvent de la nouvelle juridiction. Cela s’appelle avoir peur d’essuyer les plâtres. Pourquoi ? La JUB va être composée de magistrats de différents pays, ses règles vont inciter à fixer de nouvelles stratégies, notamment pour pouvoir ou non plaider devant l’une des divisions de la juridiction localisée dans tel ou tel pays, puisque la JUB aura une division centrale mais aussi des divisions régionales et locales. Nouvelle procédure, nouvelle stratégie, nouveau risque d’être confronté à un panel de juges de différentes nationalités adoptant des décisions qui pourront étonner par rapport à celles rendues par les juges nationaux actuels.

La mise en place effective de la juridiction et la sélection des juges avancent, même si le nombre minimum de pays nécessaire n’a pas encore ratifié l’accord la créant. Les parties qui vont y avoir affaire seront surprises car il s’agit d’une juridiction qui doit s’autofinancer au bout de 7 ans. En conséquence, dès son entrée en fonction, il faudra payer l’accès à la JUB. Payer beaucoup, surtout pour une société française habituée à la justice gratuite. Le montant de base sera de 11.000 euros additionnés d’une somme calculée sur la valeur du litige qui pourra aller jusqu’à 325.000 euros. Certes, les PME pourront bénéficier d’une réduction de 40 % mais elle ne sera pas automatique ; en revanche, l’aide juridictionnelle sera réservée aux personnes physiques.

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Payer souvent car environ 30 situations prévues dans les règles de procédure obligent à payer au début mais également en cours de litige.

Si ces montants ne sont pas forcément un problème pour les grandes sociétés, on peut se demander comment les PME, les universités et les inventeurs feront pour défendre leurs droits.

De plus, autre nouveauté, il faudra verser entre 11.000 et 20.000 euros pour avoir le droit de se défendre si l’on veut présenter une demande reconventionnelle soutenant que le ou les brevets fondant la procédure sont nuls. Consolation, on pourra, si l’on gagne, obtenir une décision condamnant le perdant à régler jusqu’à 2 et parfois 5 millions d’euros pour les frais de justice, mais il aura fallu les avancer, et l’on n’est pas sûr qu’à la fin de la procédure, le défendeur sera toujours « vivant » et capable de les payer.

Le nouveau système, qui formellement ne relève pas de l’Union européenne mais est une création des États, devrait entrer en vigueur en 2016 ou 2017. Même s’il est tard, il est encore temps de réfléchir en particulier sur les frais de procédure et surtout de commencer à se préparer à son entrée en vigueur car il impliquera la mise en œuvre de nouvelles stratégies de protection des brevets.

Auteur : Richard Milchior, Avocat associé, Granrut Avocats

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(c) ill. Shutterstock

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