Au-delà de l’événement, le rachat d’Instagram par Facebook pour la somme astronomique d’un milliard de dollars, illustre une tendance de fond : les géants du web s’intéressent de près aux startups les plus innovantes et sont prêts à mettre le paquet.
Dans un contexte où le smartphone devient désormais accessible au plus grand nombre et où les réseaux 3G (et bientôt 4G) sont de plus en plus performants, ces dernières sont de plus en plus convoitées par les géants de l’Internet. Facebook en est l’exemple le plus visible avec sa récente acquisition. Il reste néanmoins à déterminer quelle doit être la stratégie des startups de l’univers mobile. Peuvent-elles conserver leur capacité d’innovation, leur attractivité, et ne pas croire que leur rachat potentiel est leur seule perspective ?
Monopole à venir des géants historiques du web sur le mobile
En 2011, l’ogre magnanime Google a racheté 22 startups, la plupart dans le secteur social et/ou mobile. Pourtant, les professionnels du secteur voient d’un mauvais oeil la folie prédatrice des prodiges de Mountain View, particulièrement dans le secteur du E-Commerce, où Google est soupçonné de favoriser les résultats de recherche de ses services. Facebook fait désormais de même et rachète startup mobile sur startup mobile afin de s’armer solidement dans cette nouvelle « course au mobile ».
D’aucuns pensent d’ailleurs que si Marc Zuckerberg a payé Instagram si cher, c’est parce que Google s’activait en coulisse pour arracher sur le fil la firme de partage photos à la firme de Palo Alto. Pour Facebook, ce rachat était plus que stratégique, il était indispensable. Le leader des réseaux sociaux aux 850 millions d’utilisateurs doit en effet :
- Renforcer sa position sur le mobile
- Assurer sa domination dans le partage photos
- Éliminer un futur concurrent dans le mobile en s’en emparant
- Empêcher Google, Twitter, Microsoft & Co de concurrencer son hégémonie sociale
- Rester à l’avant-garde technologique
- Séduire les investisseurs avant son imminente entrée en bourse
L’avenir étant à la mobilité, investisseurs à risque et géants du web s’arrachent désormais les startups mobiles les plus prometteuses à prix d’or. Pour renforcer cette tendance, les analystes prévoient un croisement des courbes d’audience entre le desktop et le mobile dès 2014. Quant aux tablettes, elles se démocratisent elles-aussi, même si l’iPad reste encore inaccessible pour bon nombre de consommateurs non CSP+. A l’avenir, les tablettes « bon marché » vont séduire le plus grand nombre par leur attractivité et leur performance. Aux USA, avec ses 6 millions de ventes aux USA, le Kindle Fire d’Amazon et son prix attractif de 199 $ montre la voie.
Des success stories inespérées
Cette folie du mobile fait naître de très belles histoires. Prenez OMGPOP, la startup New-Yorkaise qui a signé le jeu Draw Something.
Alors qu’il est en proie à de graves difficultés financières et ce malgré les 16,6 millions de dollars levés en 4 ans, l’éditeur mobile américain décide fin 2011 de produire le jeu de la dernière chance, un certain Pictionary pour smartphone. Vous connaissez la suite…
Draw Something sort, et là, miracle. Grâce à son astucieux système de jeu en ligne et en s’appuyant de fort belle manière sur le réseau social Facebook, Draw Something est téléchargé 35 millions de fois en 6 semaines. Zynga, leader des jeux sociaux sur Facebook, décide alors de racheter OMGPOP pour 210 millions de dollars.
Ce rachat est lui aussi stratégique pour Zynga. Après s’être magistralement imposé sur le web, le leader des jeux sociaux sur Facebook rachète une des startups mobile les plus innovantes et compte bien reproduire le même schéma qu’il a su réaliser pour dominer les jeux sociaux sur le web. Ce choix s’avérera probablement payant, si Zynga et sa nouvelle équipe arrivent à reproduire la formule magique de Draw Something sur d’autres concepts à succès.
Des concepts florissants tués dans l’oeuf
D’autres histoires un peu plus incertaines peuvent également survenir. Prenez Ditto, startup florissante propriétaire d’une application iPhone et iPad de recommandation sociale pour les magasins et restaurants locaux.
Son concept avait tout pour faire un carton, celui-ci se situe entre le réseau social géolocalisé Foursquare et le site de recommandation Trip Advisor. Pourtant, son application, qui combine un système de check-in, de recommandation, de chat et d’organisation de rencontres entre amis, vient d’être retiré de l’App Store par ses fondateurs.
Et pour cause, le leader mondial des achats groupés, Groupon, vient de jeter son dévolu sur la startup et les fondateurs n’ont pas résisté longtemps à l’appel des billets. L’équipe Ditto va désormais s’attacher à rendre la plateforme de coupons un peu plus sociale afin qu’elle devienne un peu moins dépendante des investissements faramineux en marketing.
L’effet boule de neige
Après le partage social de photos, la tendance est désormais aux réseaux sociaux mobiles de partage vidéos. Deux startups se partagent la vedette.
La 1ère se nomme Viddy. Présente sur iPhone, Android et iPad, Viddy est considéré comme l’Instagram de la vidéo. La startup vient de lever 30 millions de dollars. Avec ses 10 millions d’utilisateurs, elle se voit (déjà) valorisée à 370 millions de dollars.
De l’autre côté, son concurrent se nomme Social cam. L’application de partage de vidéos mobile vient d’attirer, excusez du peu, 4 millions d’utilisateurs en 2 jours suite au buzz favorable de l’acquisition d’Instagram par Facebook.
Si le succès de ces applications venait à se confirmer dans les mois à venir, on peut parier sur le rachat d’une de ces deux startups par Google, Microsoft, Twitter ou même (encore) Facebook.
Une question se pose pour les fondateurs de start-up. Doivent-ils seulement se soucier de monter un business model profitable ou doivent-ils, comme l’ont visiblement fait les fondateurs d’Instagram, viser le rachat ?
Maximiser le nombre de ses utilisateurs sans pour autant dégrader l’expérience utilisateur est un modèle enviable, mais risqué. Les plus ambitieux et talentueux s’y tenteront, à leurs risques et périls. Quant aux plus prudents, nul besoin de s’enflammer, ils ont eu le nez fin en se lançant dans le mobile et leurs profits s’annoncent massifs.
Auteur : Maximilien Pyée, Responsable Communication et Concepteur/Rédacteur chez APPYZZ