Marchés et cibles

Ma mère est une internaute comme les autres

Les femmes ont envahi internet, et les mamans ne sont pas en reste : forums, sites dédiés, tchats… Elles prennent la parole, s’entraident et se conseillent mais souvent sans la moindre caution médicale. Eva Jouvin

En France, le nombre d’internautes femmes grimpe chaque année pour atteindre aujourd’hui les 47%. Parallèlement à cela, depuis l’an 2000, le taux de natalité augmente tous les ans. Les femmes ont donc envahi internet, et les mamans ne sont pas en reste : forums, sites dédiés, tchats… Elles prennent la parole, s’entraident et se conseillent mais souvent sans la moindre caution médicale.

Les femmes enceintes (en particulier lors de leur première grossesse) se posent beaucoup de questions et sont en proie à un stress plus grand qu’à la normale. C’est aussi une période de leur vie où elles ont plus de temps et peuvent s’occuper d’elles. Elles surfent donc plus souvent et plus longtemps sur la toile. Mais que recherchent-elles ? Tout d’abord elles visitent les sites marchands pour trouver des bonnes affaires, puis elles recherchent des informations pour répondre à leurs interrogations. Elles recherchent des symptômes, des témoignages et des articles. Pour répondre à leurs attentes, les sites comme magicmaman.com, doctissimo.com, magrossesse.com ou encore aufeminin.com sont construits sur le même modèle : des dossiers focus, des articles et surtout des forums. Les articles et les dossiers sont pour la plupart chaperonnés par des médecins ou des sages-femmes bien qu’aucune réglementation n’existe à ce sujet. Ainsi, n’importe quel site dédié aux femmes enceintes et aux jeunes mamans peut publier des articles de conseils sur la grossesse sans appui médical. Mais ce n’est pas le plus grave.

La toile des lamentations

En surfant sur les forums ayant la grossesse pour thème, on remarque deux typologies d’internautes « actives » : celles qui posent des questions et celles qui y répondent. La première catégorie regroupe les femmes les plus fragiles. Elles n’ont pas trouvé de réponses satisfaisantes auprès de leur médecin ou de leurs proches et s’en remettent donc à la communauté. La seconde catégorie regroupe souvent d’anciennes « questionneuses ». Insatisfaites de leur expérience, elles continuent à surfer sur les forums de grossesse après avoir accouché pour conseiller de jeunes mamans en détresse. Mais, là où le bât blesse, c’est que rares sont les jeunes mamans qui retournent sur les forums pour raconter un accouchement qui s’est bien passé. Lorsque tout va bien, elles sont trop occupées par leur progéniture pour naviguer. Leurs réponses constituent donc une mine de sujets anxiogènes à disposition de futures mamans fragilisées sur internet.

L’impact de ces posts sur les femmes enceintes peut être ravageur. Si l’adage veut que nous ne prenions pas d’antibiotique sans prescription, il semble donc logique qu’il en soit de même pour les conseils médicaux prodigués sur internet. Mais la réalité est bien différente. Les femmes accordent beaucoup de crédit aux propos des forums car elles y partagent leurs expériences, leurs conseils et leurs peurs. Elles sont une minorité à y participer mais très nombreuses à lire les posts. Les sites internet spécialisés doivent donc envisager de modérer à l’aide de médecins et de spécialistes, quitte à en choquer certaines sur la liberté d’expression. En attendant, ne laissons pas nos mamans trop longtemps sur internet pour ne pas mettre bébé sur la sellette !

Auteur : Eva Jouvin

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